Lors de la détection d'Ac antinucléaires, un schéma de fluorescence inhabituelle localisée à l'appareil nucléaire mitotique (NuMA) a été rapporté aboutissant à la caractérisation d'Ac anti-NuMA [1]. Plusieurs études ont suggéré une association entre la présence d'Ac anti-NuMA et le lupus (LES) ou le syndrome de Gougeröt-Sjögren primitif (SSp), pour autant ce lien n'a jamais été confirmé. L'objectif de cette étude est : – de déterminer la prévalence et les associations cliniques des anticorps anti-NuMA ; – d'étudier leur association avec le phénotype de la pathologie auto-immune. Parmi l'ensemble des résultats de demande de dépistage d'AAN prescrites entre 2013 et 2018, nous avons analysé les dossiers présentant une fluorescence anti-mitotique. Le profil phénotypique et biologique des patients SSp ou LES avec AC anti-NuMA a été comparé respectivement à une cohorte de SSp ou de LES sans Ac anti-NuMA issue du service de médecine Interne. Nous avons identifié 90 patients porteurs d'Ac anti-NuMA, représentant une prévalence de 0,36 %. Soixante-six (73 %) d'entre eux avaient une fluorescence anti-NuMA1 et 24 patients (26 %) avaient une fluorescence anti-NuMA2. Parmi ces 90 patients, 61 patients (68 %) avaient une maladie auto-immune : SSp (29 %), LES (21 %), connectivite indifférenciée (8 %), polyarthrite rhumatoïde (6 %), neuromyélite optique (1 %), syndrome des anticorps anti-phospholipides primaire (1 %), purpura thrombopénique immunologique (1 %), maladie de Biermer (1 %). Quatre patients (4 %) présentaient une pathologie cancéreuse et quatre patients (4 %) avaient une maladie infectieuse. 12 études parues à ce jour dans la littérature rapportent les mêmes caractéristiques que les patients de notre cohorte. En réunissant les résultats issus de notre étude et des 12 études précédentes, par rapport aux patients porteurs d'Ac anti-NuMA 2, les patients porteurs d'Ac anti-NuMA1 avaient un titre d'AAN plus élevé (1/789 versus 1/457), une association plus fréquente à d'autres auto-Ac (26 % versus 15 %) et à d'autres maladies auto-immunes (72 % versus 60 %). De plus, par rapport aux patients porteurs d'Ac anti-NuMA sans maladie auto immune, les patients avec des maladies auto-immunes étaient plutôt des femmes jeunes (85 % versus 66 % ; 52 ans versus 54 ans), et avaient un titre d'AAN plus important (1/1192 versus 1/595), une association à d'autres auto-Ac (29 % versus 8 %) et une fluorescence anti-NuMA1 plus fréquentes (81 % versus 66 %). Nous avons comparé 20 patients atteints de SSp porteurs d'Ac anti-NuMA à 137 patients SSp sans anti-NuMA. Les patients porteurs d'anti-NuMA avaient un phénotype moins sévère avec significativement moins de syndrome sec ophtalmique (70 % versus 89 %, p = 0,031 %), de complications du syndrome sec (15 % versus 39 %, p = 0,045), moins porteurs d'Ac anti-ENA (40 % versus 69 %, p = 0,022), notamment d'Ac anti-SSa et/ou SSb (40 % versus 66 %, p = 0,027), et avaient reçu moins d'HCQ (45 % versus 71 %, p = 0,038). Nous avons comparé 14 patients avec un LES et des Ac anti-NuMA à 80 patients atteints de LES sans anti-NuMA. Les patients avec anti-NuMA présentaient un phénotype moins sévère, notamment pas de glomérulonéphrite lupique (0 % versus 28 %, p = 0,019) et moins d'auto-Ac (50 % versus 85 %, p < 0,01), moins d'Ac anti-ADN natifs (42 % versus 75 %, p = 0,025) et d'anti-SSa/SSb (7 % versus 45 %, p < 0,01), moins de consommation du complément (21 % versus 54 %, p = 0,040), moins d'hypergammaglobulinémie polyclonale (20 % versus 61 %, p = 0,019). De plus, ils avaient reçu globalement moins de traitement par antipaludéen de synthèse (57 % versus 96 %, p < 0,001), ou corticoïdes (64 % versus 92 %, p < 0,01). Chez les patients lupiques, le taux d'AAN était augmenté chez les patients en poussées (1/1280 versus 1/800 ; p = 0,035). Bien que leur prévalence soit faible, les Ac anti-NuMA semblent associés aux maladies auto-immunes, notamment le LES et le SSp. De plus, ils pourraient être un biomarqueur intéressant dans ces pathologies autoimmunes, notamment lorsque les anticorps classiques ne sont pas détectés. Enfin, on a pu mettre en évidence que les patients LES et SSp présentant un Ac anti-NuMA avaient un profil phénotypique et évolutif particulier, avec des atteintes moins sévères. [ABSTRACT FROM AUTHOR]