751. La nature : d’un objet d’appropriation à un sujet de droit. Réflexions pour un nouveau modèle de société
- Author
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Matthias Petel and UCL - SSH/JURI/PJTD - Théorie du droit
- Subjects
droits de la nature - écocentrisme - marchandisation - productivisme - appropriation - écologie ,General Materials Science - Abstract
Nos sociétés ont validé le credo cartésien selon lequel l'homme doit se comporter comme maître et possesseur de la nature. Cette contribution analyse certaines clés de la crise écologique actuelle : le dualisme et l’anthropocentrisme au cœur de nos fondements éthiques, la propriété privée et sa justification utilitariste au sein des ordres juridiques, ainsi que la marchandisation propre au système capitaliste. Le droit de l'environnement lui-même s'est intégré dans ce corpus préexistant puisque loin d'avoir poussé à l'émergence de nouveaux modèles, il a maintenu une foi inébranlable dans le marché comme régulateur environnemental. Les droits de la nature ont pour but de provoquer une révolution. Une révolution philosophique au sens où une valeur intrinsèque est reconnue aux écosystèmes : la nature n’est pas valorisée uniquement au travers des bienfaits que l’humanité peut en retirer. Une révolution juridique dans la mesure où la nature devient un sujet de droit et cette dernière n’est plus protégée uniquement au gré des intérêts humains. Une révolution culturelle enfin par la valorisation des peuples autochtones pour lesquels l’interdépendance, la réciprocité et la complémentarité sont des valeurs fondamentales ancrées dans une cosmologie qui replace l’homme à l’intérieur de la nature. Cette avancée n'a pas pour but de se réaliser au détriment du bien-être humain mais de le replacer à l'intérieur de limites écologiques. Les droits de la nature sont un instrument qui condamne tant l’exploitation de la nature que l’exploitation des humains les plus vulnérables au sein du système productiviste. Si l’idée de séparation radicale entre l’humanité et le monde naturel est écartée, alors les droits de la nature protègent autant les écosystèmes que les communautés humaines face à des logiques prédatrices fondées sur le profit. En ce sens, les droits humains et les droits de la nature sont complémentaires et interdépendants.
- Published
- 2018