La situation que nous vivons actuellement est inédite. Déclarant l'état d'urgence sanitaire afin de juguler une épidémie redoutable, les autorités ont décrété le confinement à domicile de la majorité de la population de notre pays pour plusieurs semaines. En quelques jours surgissent d'innombrables interrogations pour des espaces très divers : épidémiologiques, immunologiques, sociologiques, scientifiques de l'information, médicaux, administratifs, politiques, etc. Nous proposons une réflexion destinée à décrire les enjeux psychologiques, expliciter les troubles constatés et discuter les moyens pour les prendre en charge dans la durée. Nous basons notre réflexion sur une revue de la littérature confrontée à notre expérience clinique actuelle, y compris concernant les possibilités de suivi médico-psychologique dématérialisé. Nous rappelons les répercussions collectives des risques létaux de masse émergents, et en particulier des agents infectieux viraux, avant d'aborder les modèles scientifiques existants de confinement collectif d'après les opérations militaires en zone hostile, les missions d'hivernage polaire et de conquête aérospatiale. Il apparaît que pour l'étude d'un confinement global, quelque peu étudié lors de pandémies antérieures, les conceptions de l'adaptation au stress et de l'adaptation psychodynamique s'avèrent pertinentes. Nous détaillons les conséquences psychologiques du confinement sur les santés psychiques individuelles et leurs contre-mesures en fonction de trois typologies populationnelles : population générale, population des soignants en première ligne contre l'épidémie, et population des sujets déjà en souffrance psychique ou voyant leurs troubles réapparaître. Nous faisons également référence aux travaux de psychologie cognitive sociale explicitant comment, en situation anxiogène, les raisonnements peuvent être biaisés et conduire à des choix s'avérant in fine peu rationnels, de l'avis même de ceux qui les ont faits. La situation actuelle dans le domaine de la santé est en cela propice, comme en témoigne le « débat sur la chloroquine » largement relayé dans les médias et sur les réseaux sociaux, opposant des conclusions le plus souvent tranchées à partir de connaissances d'un certain degré de scientificité, d'une part, mais aussi en fonction de ce qui semble être les fantasmes de tous ceux qui recherchent soit un remède miracle, soit une occasion de faire prospérer une « théorie du complot », d'autre part. Les répercussions psychologiques du confinement apparaissent conditionnées par les multiples formes que peut prendre ce dernier : volontaire ou subi, plus ou moins prolongé, passé chez soi ou dans un autre lieu, vécu dans l'isolement individuel ou en petite communauté, associé à d'autres facteurs de stress et/ou traumatiques, etc. Le confinement à domicile d'une population à l'échelle d'un pays n'a jamais été évalué. Cette expérience nous semble confronter globalement notre société au tabou de la mort qui s'impose, mort de plus en plus éludée au fur et à mesure que l'« homme occidental » tente de s'éloigner de ses origines terrestres. En ce sens, des répercussions de type psychotraumatique sont à prévenir. Afin de faire face à de multiples enjeux, le système de soins s'est adapté avec notamment le développement de l'usage d'Internet pour la mise à disposition d'informations destinées à mieux vivre le confinement, ou encore la généralisation de la psychothérapie à distance qui pose autant de questions qu'elle apporte de réponses. Ces intrications des techniques informatiques dans l'espace de la psychothérapie, techniques envers lesquelles nous avions quelques incrédulités, se sont imposées aussi rapidement que le virus : obligation est faite aux cliniciens et aux chercheurs d'en mesurer les enjeux et les conséquences. Des programmes de santé publique pourraient voir le jour sur le modèle de ceux déjà existants afin de prendre en charge des troubles chroniques endémiques bien connus : protection contre les effets d'une alimentation déséquilibrée associée à la sédentarité, lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme, prévention des conduites auto-agressives, etc. Il nous faudra aussi soutenir les soignants qui ont été en première ligne et qui sortiront éprouvés de cette pandémie : en dépendra la pérennité des capacités d'action de notre système de soins pour revenir à son état nominal et aussi peut-être, pour qu'il puisse faire face aux conséquences d'autres crises, notamment sociales. The situation we are currently experiencing is unprecedented. Declaring a state of health emergency in order to curb a frightening epidemic, the authorities have decreed the home confinement of the majority of the population of our country for several weeks. In a few days, innumerable questions arise for very diverse spaces: epidemiological, immunological, sociological, information scientists, medical, administrative, political, etc. We propose a reflection intended to describe the psychological risks, to clarify the disorders found, and to discuss the means to take care of them in the duration. We base our thinking on a review of the literature confronted with our current clinical experience, including concerning the possibilities of dematerialised medico-psychological monitoring. We recall the collective repercussions of emerging lethal mass risks, and in particular viral infectious agents, before approaching the existing scientific models of collective confinement according to military operations in war zones, polar wintering missions and aerospace conquest. It appears that for the study of a global containment, somewhat studied during previous pandemics, the conceptions of stress reaction and psychodynamic adaptation prove to be relevant. We detail the psychological consequences of confinement on individual mental health and their countermeasures according to three population typologies: general population, population of caregivers on the front line against the epidemic, and population of subjects already suffering from mental illness or seeing their disorders reappear. We also refer to works in social cognitive psychology explaining how, in an anxiety-provoking situation, reasoning can be biased and lead to choices that ultimately prove to be not very rational, in the opinion of those who made them. The current situation in the health sector is favourable in this, as evidenced by the "debate on chloroquine" widely reported in the media and on social networks, opposing conclusions most often decided on the basis of beliefs on contrary to evidence based medicine. The psychological repercussions of confinement appear conditioned by the multiple forms that it can take: voluntary or suffered, more or less prolonged, spent at home or in another place, lived in individual isolation or in a small community, associated other stressors and/or traumatic factors, etc. The home confinement of a population across a country has never been assessed. This experience seems to us to confront our society as a whole with the taboo of death, which is imposed, death more and more evaded as the "Western man" tries to move away from his terrestrial origins. In this sense, psychotraumatic type repercussions are to be prevented. In order to face multiple challenges, the healthcare system has adapted with, in particular, the development of the use of the Internet for the provision of information intended to better experience confinement, or even the generalisation of e-psychotherapy asking as many questions as it provides answers. These intricacies of computer techniques in the area of psychotherapy, techniques with which we had some questioning, became established as quickly as the virus: the task of clinicians and researchers to measure the issues and the consequences. Public health programs could emerge on the model of those already existing in order to manage well-known chronic endemic disorders: protection against the effects of an unbalanced diet associated with a sedentary lifestyle, fight against smoking and alcoholism, prevention of self-aggressive behaviour, etc. We will also need to support the caregivers who have been on the front line and who will emerge tested from this pandemic: depending on the sustainability of the action capacities of our healthcare system to return to its nominal state and also perhaps, so that it can face consequences resulting from other crises, especially social ones. [ABSTRACT FROM AUTHOR]