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Les déplacements, les itinérances, les pérégrinations suscitent depuis longtemps l’intérêt. D’innombrables écrits sont consacrés à ces pratiques. Évènements majeurs de vies d’artistes et de scientifiques, d’écrivains et d’entrepreneurs, de diplomates et d’anonymes, ils ont permis d’observer les pratiques autochtones, leur porosité ou leur herméticité. Quelle que soit sa forme, le voyage agit comme un percolateur des cultures, des techniques, des sensations, des goûts, des savoirs. Il couvre d...

La lectrice ou le lecteur qui auront voyagé en train ces vingt dernières années éprouveront peu d’étonnement devant la description qui vient clore ce long récit. Elle est pour une part leur propre histoire. Familiers des voitures 4 et 14 dans les rames du TGV ou consommateurs occasionnels de produits achetés en gare, ils n’auront pas de mal à s’approprier plusieurs observations. Temps gaspillé au comptoir de gare pour une halte anonyme, faute de trouver plus avenante la salle d’attente. Piéti...

La mise en place d’un service de restauration dans le train introduit un tournant essentiel des pratiques alimentaires en voyage. Son histoire a suscité des représentations littéraires d’écrivains voyageurs, de Valéry Larbaud à Paul Morand, et des mises en scène cinématographiques, mémorisées à l’aide des meilleurs Hitchcock. C’est au point qu’elle recouvre du seul apparat de la voiture-restaurant des réalités très diverses. Déclinée en dining car, carrozza ristorante, speisewagen, celle-ci e...

Le chemin de fer n’a pas créé la restauration en voyage. Les modes de déplacement sur les routes et le long des rivières rendaient nécessaire l’établissement de lieux pour manger depuis plusieurs siècles. Ces gîtes étaient des étapes obligées par la longueur des trajets. Avant 1776, la route de Paris à Strasbourg imposait plus d’une vingtaine de repas en dix jours. Le raccourcissement des distances par l’augmentation des vitesses modifia la fréquentation contrainte de ces tables. À la fin du ...

Les premiers buffetiers et le fondateur de la Compagnie internationale des wagons-lits partageaient un objectif commun. Parmi les besoins du voyageur, celui de son alimentation ouvrait un marché dont on attendait qu’il soit pérenne, croissant et rentable. Les étapes parcourues depuis ces initiatives ont montré que la diversité des demandes l’emportait sur tout calcul rationnel. L’augmentation du nombre de voyageurs a élargi les requêtes pour se nourrir ou boire en voyage au lieu de les unifor...

La particularité alimentaire associée à un lieu, mise en évidence par le voyage, n’était pas nouvelle dans les années que nous allons considérer. Le Touring Club appelait à « garder la tradition des plats du pays, des condiments de la contrée, bien autrement affriolants pour la grande majorité des touristes que les sauces et leurs arômes fadasses ». Destinés aux cyclistes et aux automobilistes, des commentaires émanaient des académies, des clubs, des sociétés de province et des guides. Michel...

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, la voiture-restaurant aux décors de Lalique et de Prou, qui invitaient le voyageur dans un espace intemporel et fuyant, maintenait l’approche traditionnelle de la restauration en voyage. Pourtant, lors d’un conseil d’administration de la SNCF, le syndicaliste André Paillieux évoquait cette restauration ferroviaire mobile en des termes très critiques : Le service continue d’y être assuré dans des conditions très défectueuses et préjudiciables au prestig...

Les buffets de gare se sont multipliés au rythme du trafic ferroviaire. La moyenne kilométrique annuelle exploitée en France passa de 9000 kilomètres à 40000 kilomètres entre 1860 et 1913. On comptait 529 millions de voyageurs en 1913 dont 160 millions transitaient par les gares parisiennes. Conséquence de cette progression, ils dépassèrent la centaine dans les années 1870, pour atteindre 445 en 1914 et un maximum de 488 buffets en 1938. Sous un terme générique, leur architecture, leur activi...

Les effets du TGV sont connus. Des témoignages ont présenté une aventure industrielle unique. Des points de vue tranchés ont été avancés sur ses conséquences. Porté par la SNCF, les constructeurs de matériel, les pouvoirs publics et jusqu’aux maires désireux d’avoir « leur » gare TGV, il est devenu un symbole de la France. Le recul historique a fait prendre conscience des investissements insuffisants engagés en contrepartie pour maintenir des liaisons ferroviaires secondaires utiles et effica...

Au même titre que les auberges routières de célèbres nationales, les somptueuses salles à manger des paquebots transatlantiques, les services à bord du transport aérien, la restauration ferroviaire a pris place dans les alimentations mobiles. Des années 1830 aux années 2020, ses formes ont varié. En France, elle se résume aujourd’hui au bar des TGV, aux boutiques de vente à emporter près des quais et aux restaurants mélangés des quartiers de gare. Mais elle cache une histoire longue. Les buffets de gare sont apparus aux débuts du chemin de fer. Parfois tables de haute cuisine jusque dans les années 1950, ils ont ensuite été relégués à des rôles secondaires. L’idée de raccorder une voiture-restaurant aux convois des voyageurs aisés a connu un succès réel à la fin du xixe siècle. L’image rémanente des grands express finit par rejeter dans l’ombre le wagon-bar de banlieue et le panier garni avalé dans l’inconfort par la majorité des mangeurs. C’est pour eux que le plateau-repas, le chariot ambulant et le Gril-Express ont été conçus. L’histoire de la restauration ferroviaire croise ainsi l’étude de l’alimentation et la dynamique des mobilités, le cadre des entreprises et les pratiques de consommation.

Plusieurs ruptures importantes ont déterminé l’évolution de la restauration ferroviaire dans les dernières décennies du xxe siècle. Les tarifs des TEE ont été fortement augmentés. Le système de repas réchauffés servis à la place dans les trains Corail a été étendu. Il fallut revoir les voitures Gril-Express dont la propreté et l’étroitesse de circulation ne correspondaient plus au niveau de prestation demandé. La vente ambulante s’est accrue en repensant l’aménagement du chariot. Dans les tra...