Cette communication a pour but d'interroger, dans le contexte associatif francais, la perspective d'une homologie structurelle entre les organisations du tiers secteur et les entreprises marchandes, et la facon dont le neo-liberalisme, par son empreinte dans tous les secteurs, peut oberer les capacites d'intelligence strategique de l'animateur. Elle tente de repondre a la question suivante : Dans un contexte ou les organisations doivent securiser leurs financements, et pour ceci la plupart du temps developper ou varier leurs activites, comment les logiques de rationalisation et de croissance influencent-elles l'animateur dans sa facon d'impliquer les publics ? Le contexte socio-economique et politique dans lequel les associations baignent les fragilise. Les craintes des dirigeants associatifs, concernant les moyens financiers ou humains de leur action sont grandissantes. La mise en concurrence, a toutes les echelles territoriales, par des politiques volontaires et/ou la rarefaction des ressources financieres, les amene a s'inscrire dans une course en avant visant a securiser leurs financements et particulierement ceux qui sont necessaires a la preservation de leurs emplois. Certains animateurs s'avouent ainsi contraints a une " peche aux projets " dans laquelle ils ont le sentiment de s'eloigner de leur vocation emancipatrice initiale. A ces pressions qui s'exercent sur les financements s'ajoutent la culture de la responsabilite des politiques publiques et les evaluations qui l'accompagnent. Elles obligent les acteurs associatifs a rationaliser leur activite afin de pouvoir en rendre compte. Cette culture de l'" accountability ", dont certains sociologues ont deja denonce les effets pervers dans le travail social, impose a l'animateur un role de gestionnaire au detriment de ses missions originelles. A ces contraintes s'ajoutent des dispositifs incitatifs (promotion du benevolat, du service civique, du mecenat de competences), des quasi-injonctions institutionnelles (au partenariat, a la mise en reseau, a la mutualisation), et une disponibilite saillante de certains moyens (agences de moyen, outils de communication) qui entrainent l'animateur dans une demarche opportuniste plutot que planifiee a partir de ses valeurs. Or " on ne contrecarrera pas le projet neoliberal d'anesthesie de la capacite citoyenne sans le developpement d'une praxis reflechie et competente " (Lafortune, Augustin, Belanger, & Gillet, 2009). Ce travail vise a montrer comment l'ensemble de l'environnement dans lequel evoluent les associations peut eloigner l'animateur de cette praxis pourtant indispensable. A partir d'enquetes menees sur les besoins des associations, d'analyse qualitative des parcours d'associations et de leurs benevoles, et de temoignages de professionnels, on repere des mouvements qui modifient la facon de prendre en compte les autres acteurs associatifs (benevoles, dirigeants, adherents et beneficiaires) et nuisent a la transformation sociale que l'animateur devrait pourtant conduire avec eux.