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‘Abd al-Ḥayy al-Kattānī est né en 1883 dans une famille de savants fassis proches du pouvoir. Chef de confrérie, il s’est également investi en politique ; son implication dans la tentative de déposition de Muḥammad V précipita son exil à Nice où il mourut en 1962, après confiscation de ses biens, parmi lesquels une impressionnante collection privée : la Maktaba kattāniyya. Fruit d’années d’efforts et de nombreuses pérégrinations du savant marocain au Maghreb, au Moyen-Orient mais aussi en Europe, les milliers de manuscrits rares qu’elle compte font de cette bibliothèque l’une des plus riches et précieuses de tout le monde arabe. Après une brève présentation du parcours de ‘Abd al-Ḥayy, cet article décrit précisément le contenu de la bibliothèque, son rayonnement dans le monde arabe, son rôle sous le protectorat et sa postérité. ‘Abd al-Ḥayy al-Kattānī was born in 1883, into a family of Fassi scholars close to the government. He was the leader of a Brotherhood and also involved in politics; his involvement in the attempted impeachment of Muḥammad V precipitated his exile to Nice, where he passed away in 1962, shortly after having had his possessions confiscated, among which was one of the most prestigious private collections in Morocco, if not in the whole of the Arab world: the Maktaba kattāniyya. Resulting from years of effort and numerous peregrinations of the Moroccan scholar in the Maghreb, the Middle East and Europe, the thousands of rare manuscripts in the library’s catalogue make this one of the richest and most precious collections of the Arab world. After a presentation of ‘Abd al-Ḥayy’s career, this article accurately describes the contents of the library, its influence in the Arab world, its role under the protectorate and its posterity. ولد عبد الحي الكتاني سنة 1883 في عائلة فاسية عالمة مقربة من البلاط السلطاني. ومن موقعه كشيخ للطريقة الكتانية، اشتغل بالسياسة حيث ترتب عن مساهمته في محاولة خلع السلطان سيدي محمد بن يوسف (محمد الخامس)، وهي المحاولة التي منيت بالفشل، إرغامه على المنفى والإقامة بمدينة نيس الفرنسية على حين وفاته سنة 1962. ومن تداعيات سقوطه، تجريده من كل أملاكه، وبينها واحدة من أفخر مجموعات المخطوطات والمؤلفات في ملكية الخواص ليس فقط بالمغرب، بل في العالم العربي. وتعد مخزونات المكتبة الكتانية، ثمرة سنوات طويلة من الجهد في التجميع، والتنقل إلى أماكن متعددة قام بها هذا العلامة بين المناطق في بلاد المغرب، وبلدان المشرق العربي وكذلك أوروبا. وقد ضمت المكتبة آلاف المخطوطات الناذرة والنفيسة، بشكل جعلها واحدة من أغنى المكتبات في كامل العالم العربي. وبعد عرض مقتضب لمسار عبد الحي الكتاني، تفصل المقالة بشكل خاص في رصيد المكتبة، وإشعاعها في العالم العربي، وأدوارها زمن الحماية الفرنسية، وما آلت إليه بعد رحيل صاحبها.

TheMuršida, an Ašʿarī treatise attributed to Ibn Tūmart (d. 524/1130), represents one of the most famous written traces of the presence of Ašʿarism in the Maghreb. One of his most widespread commentaries isal-Anwār al-mubayyina al-muʾayyida li-maʿānī ʿaqd ʿaqīdat al-Muršida(“The enlightenment that exposes and supports the meanings of the creedal-Muršida”). Its fame compared to the other comments stems from that of its alleged author: Muḥammad b. Yūsuf al-Sanūsī (d. 895/1490), a central figure in later Ašʿarī theology. Yet almost everything suggests that he is probably not the author of this comment. But this does not diminish the importance of the text: it could be one of the first commentaries of theMuršida., [fr] LaMuršida, traité ašʿarite attribué à Ibn Tūmart (m. 524/1130), représente une des plus célèbres traces écrites de la présence de l’ašʿarisme au Maghreb. L’un de ses commentaires les plus répandus a pour titreal-Anwār al-mubayyina al-muʾayyida li-maʿānī ʿaqd ʿaqīdat al-Muršida(« Les lumières qui exposent et appuient les sens de la profession de foial-Muršida»). Sa célébrité par rapport aux autres commentaires tient de celle de son auteur présumé : Muḥammad b. Yūsuf al-Sanūsī (m. 895/1490), figure centrale de l’ašʿarisme tardif au Maghreb. Pourtant, tout - ou presque - porte à croire qu’il n’est vraisemblablement pas l’auteur de ce commentaire. Mais cela n’amoindrit pas l’importance du texte : il pourrait être l’un des premiers commentaires de laMuršida.

La Mudawwana, des Almohades aux Mérinides : de la censure à « l’âge d’or » Sans surprise, il est difficile d’établir l’œuvre complète d’un savant aussi peu connu qu’Abû ‘Imrân. Razzūq a signalé qu’un ouvrage de jurisprudence malékite, intitulé al-Naẓâ’ir, lui était attribué. On lit par ailleurs chez certains malékites tardifs qu’il est l’auteur d’un commentaire de la Mudawwana, cité comme une référence. Cette information est à croiser avec celle, déjà citée plus haut, concernant l’œuvre de s...

Invalidation de la thèse de Mannûnî Le premier obstacle à notre démarche d’identification a été la contrainte, non-négligeable, qu’aucune source biographique disponible ne propose une notice sur Abû ‘Imrân. Tout était donc à faire : déterminer à la fois son identité et son époque. Le premier, et sans doute le seul, qui, à notre connaissance, a tenté d’identifier Abû ‘Imrân est le chercheur marocain Muḥammad al-Mannûnî. Son hypothèse fut la seule relayée durant plusieurs décennies. Tout en rec...

Attribution du texte à l’auteur Jusqu’à présent, nous avons pu trouver deux textes se référant à la ‘Aqîda d’Abû ‘Imrân et la lui attribuant de façon explicite. Le premier est un commentaire de notre traité lui-même. Il est attribué à un certain ‘Abd al-Wâḥid b. Yakhlif al-Maṭgharî al-Tabaḥrîtî. Au vu des références de l’ouvrage, ce commentateur était très certainement postérieur au IXe/XVe siècle, et a sans doute vécu à Tabaḥrît. Le second est un commentaire de la Murshida dont l’auteur est ...

Compte tenu de tout ce qui précède, nous sommes à présent en mesure de brosser un portrait plus affiné de notre auteur. Abû ‘Imrân al-Jawrâ’î serait un juriste malékite et un théologien ash‘arite de Fès, né vers 580/1184, sans doute d’origine berbère, de Tadla (actuel Sud-Est marocain) ou du village de Jarâwa (Nord-Ouest). Il fait partie des savants qui connurent à Fès la période cruciale de transition entre les dynasties almohade et mérinide, passant d’une tentative d’élimination du malékism...

Les ilâhiyyât (§ 1-11) Démonstration textuelle et rationnelle de l’existence de Dieu (§ 1-6) Notre auteur inaugure son traité par une démonstration de l’existence de Dieu. Abû ‘Imrân signale une chose sur laquelle les savants musulmans (théologiens, traditionnistes, exégètes, etc.) sont d’accord : les créatures sont une preuve de l’existence du créateur. Comme aiment à le rappeler théologiens et exégètes, l’ensemble des créatures est appelé ‘âlam (« monde »), car il est un ‘alam (« un signe »...

Les ilâhiyyât (§ 1-11) Que Dieu augmente et glorifie le rang de notre maître Muḥammad ainsi que ses compagnons et ses proches musulmans. Voici ce qu’a dit le maître Abû ‘Imrân al-Jawrâ’î, que Dieu lui fasse miséricorde et l’agrée : (1) Par le biais des créatures, on connaît le créateur, tout comme par le biais des choses façonnées on connaît celui qui les a façonnées. La preuve de cela tient du texte et de la raison. (2) Quant au texte : il s’agit de Sa parole qui signifie : « Et en vous-mêm...

‘Aqîdat al-Jawrâ’î dans l’histoire de l’ash‘arisme maghrébin Dans ce vaste domaine que représente l’histoire de la pensée musulmane, notre champ de spécialisation concerne tout ce qui a trait à la diffusion de l’ash‘arisme dans l’Occident musulman : ses étapes, les figures savantes qui l’ont incarné et ses productions. En effet, nous nous intéressons à l’appropriation maghrébine de cette théologie, avec comme projet d’établir une histoire des productions écrites locales et de parvenir à retra...

الإلاهيات(§ 1-11) صلى الله على سيدنا ومولانا محمد وآله وصحبه وسلم تسليمًا. قَالَ الشَّيْخُ الفَقِيهُ أَبُو عِمْرَانَ الجَوْرَاءِي رَحِمهُ الله تَعَالَى وَرَضِيَ عَنهُ: .1 بِالمَخْلُوقَاتِ يُعْرَفُ الخَالقُ كَمَا أَنَّ بالمَصْنُوعَات يُعْرَفُ الصَّانِعُ. وَالدَّلِيلُ عَلَى ذَلِكَ النَّقْلُ وَالعَقْلُ. .2 فَأمَّا النَّقْلُ: فَقَوْلُهُ تَعَالَى ﴿وَفِي أَنْفُسِكُم أَفَلَا تُبْصِرُونَ﴾ [الذارايات : 21] وَقَوْلُهُ صلى الله عَلَيْهِ وَسَلمَ: مَنْ عَرَفَ نَفْسَهُ فَقَدْ عَرَفَ رَبَّهُ. .3 وَأَما العَ...

Manuscrits Ce traité, nous l’avons dit, a de très nombreuses copies, réparties en particulier dans toutes les bibliothèques du Maroc : il serait fastidieux de les énumérer, mais nous pouvons estimer que chaque bibliothèque en conserve au moins une copie. La Khizâna Ḥasaniyya de Rabat en abrite à elle seule huit. De nombreuses autres copies sont conservées à l’extérieur du royaume : 17 copies à la Bibliothèque Juma Majid (Dubaï) ; 6 copies à la Bibliothèque nationale de France, toutes consult...

Il y a moins d'un siècle, des recherches ont permis d'ajouter à la liste des savants maghrébins méconnus un nouveau nom : Abû ‘Imrân al-Jawrâ’î. Cette méconnaissance peut interpeller quand on sait que la profession de foi de ce théologien ash'arite était encore massivement enseignée dans toute l'Afrique du Nord jusqu'au début du XXe de notre ère, soit près de sept siècles après sa mort. Comment ce texte, qui a longtemps été mémorisé dans les écoles traditionnelles aux côtés d'autres textes célèbres, tel la Murshida d'Ibn Tûmart, a-t-il pu ainsi tomber dans l'oubli ? Après une tentative d'identification de l'auteur, cette monographie apporte un éclairage sur l'enseignement de l'ash'arisme à Fès à son époque présumée, à savoir celle de la transition entre une dynastie almohade qui ambitionne de faire disparaître le malékisme et un pouvoir mérinide qui soutient l'enseignement traditionnel en multipliant la construction de medersa-s. Cette profession de foi, dont ce livre présente l'édition critique pour la première fois, accompagnée de sa traduction et son commentaire, met en lumière l'un des aspects de l'enseignement de l'ash'arisme à Fès deux siècles avant l'ère d'al-Sanûsî (m. 895/1490).

Ce texte a pour objectif de revenir sur les nouvelles recherches menées sur la ʿaqīda d’Abū ʿImrān al-Ǧawrāʾī depuis notre précédente contribution. Nous analyserons, dans un premier temps, les nouvelles hypothèses émises concernant l’identité de notre auteur et étudierons à quel point elles confirment ou infirment celles que nous avions déjà défendues dans notre précédent article. Ensuite, nous présenterons un passage inédit de ce texte, absent de toutes les recherches postérieures à notre travail, tiré du ms. al-Madīna, Maktabat al-Masǧid al-Nabawī, 8/80, et dont l’édition-traduction apporte quelques éclaircissements supplémentaires sur l’époque de l’auteur. This paper aims to review the new research carried out on Abū ʿImrān al-Ǧawrāʾī’s ʿAqīda, since our previous contribution. We will first analyze the new hypotheses made concerning the identity of our author and then study the extent to which they confirm or disprove what we had already defended in our previous article. Furthermore, we will present an unpublished passage of this text, absent from all the research following our work, by drawing on MS al-Madīna, Maktabat al-Masǧid al-Nabawī, 8/80. Based on this manuscript, our edition and translation provide some additional clarifications on the author’s time. تهدف هذه الورقة إلى استعراض أحدث الأبحاث عن عقيدة أبو عمران الجورائي منذ صدور مشاركتنا الأخيرة عنه. في هذا الصدد، سنقوم أولا بتحليل النظريات الجديدة حول هوية المؤلف وسنرى هل توافق أم لا ما استنتجناه في مقالنا السابق. بعد ذلك سنقدم مقطعا جديدا من العقيدة لم يسبق نشره من قبل مأخوذا من مخطوط محفوظ بمكتبة المسجد النبوي في المدينة المكرّمة تحت رقم ٨\٨٠. وأخيرا سنبرز بعض الإضاءات الجديدة التي يلقيها هذا المقطع على العصر الذي ينتمي إليه المؤلف.

On ne peut que se féliciter de l’intérêt croissant porté par les chercheurs comme Laura Hassan à l’ashʿarisme, domaine relativement laissé en déshérence – en France du moins –, alors même que les derniers bouleversements des sociétés musulmanes redonnent une actualité aux débats brûlants qui, jadis, opposaient les Ashʿarites aux Muʿtazilites ou encore aux anthropomorphistes se réclamant du ḥanbalisme. D’ailleurs, c’est à la doctrine d’un ashʿarites ḥanbalite devenu shāfiʿite – fait trop singu...

Il y a moins d’un siècle, des recherches ont permis d’ajouter à la liste des savants musulmans méconnus un nouveau nom : Abū ʿImrān al-Ǧawrāʾī. Cette méconnaissance peut interpeller quand on sait qu’une partie de l’œuvre de ce théologien ašʿarite était encore enseignée massivement dans toute l’Afrique du Nord jusqu’au xiie/xviiie siècle, soit plus de cinq siècles après sa mort. Cet article apporte donc de nouveaux éléments biographiques sur ce savant dont on ne sait rien. Son traité de croyance, dont nous proposons une édition pour la première fois, illustre l’un des aspects de l’activité théologique en Afrique du Nord avant al-Sanūsī (m. 895/1490). Less than a century ago, research allowed us to add Abū ʿImrān al-Ǧawrāʾī to the list of unknown Muslim scholars. The fact that this scholar is largely unknown may be puzzling, knowing that some works of this Ašʿarī scholar were still widely taught all over North Africa until the 12th/18th century, i.e. more than five centuries after his death. This article brings new biographical elements on this otherwise unknown theologian. This treaty on faith, of which we offer the first edition, illustrates one of the aspects of the theological activity in North Africa before al-Sanūsī (d. 895/1490). منذ أقلّ من قرن، ألقتْ الدراسات الاستشراقيّة الضوء على وجود عالمٍ مغمور من علماء المغرب هو أبو عمران الجورائيّ. وكون هذا العالم الأشعريّ مغمورًا هو أمرٌ عجيب لا سيّما أنّه ألّف عقيدةً ذاع صيتها في الشمال الإفريقيّ وانتشر تدريسها في القرن الثاني عشر الهجريّ/الثامن عشر الميلاديّ، أي خمسة قرون بعد وفاته، واستمرّ ذلك إلى ما قبل الاستعمار. تسعى هذه المقالة إلى رصد عناصر كافية لرسم نبذةٍ تعريفيّة عن هذا العالم المغمور. وتمثّل عقيدته الّتي نعرض تحقيقها للقرّاء لأوّل مرّةٍ مظهرًا من مظاهر النشاط العقديّ الأشعريّ في شمال إفريقيا قبل عصر محمّد بن يوسف السنوسيّ (ت ٨٩٥ / ١٤٩٠).