Sylvain Barone, Gestion de l'Eau, Acteurs, Usages (UMR G-EAU), Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement (Cirad)-AgroParisTech-Institut national d’études supérieures agronomiques de Montpellier (Montpellier SupAgro), Institut national d'enseignement supérieur pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Institut Agro)-Institut national d'enseignement supérieur pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Institut Agro)-Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA)-Institut de Recherche pour le Développement (IRD), National hors Recherche (partenariat avec la sphère publique (sans AO)), irstea, and ONEMA
The concept of ecological damage refers to objectively ascertainable offenses against nature. This concept is becoming more and more important in European and French law. In France, the judgment of the Paris Court of Appeal of 30 March 2010, delivered in the Erika case, is part of a jurisprudential trend that began a long time ago, primarily at the instigation of penal courts. Moreover, specifically in the field of water and aquatic environments, Article 23 of the European Water Framework Directive 2000 states that the law should include a set of measures leading to "effective, proportionate and dissuasive" sanctions. Several public reports followed in France, recommending the increase of repression of offenses in this area. Our initial question is to better understand the discrepancy between, on the one hand, these recommendations to increase the repression of offenses against nature and, on the other hand, a reality characterized by few and mainly non-dissuasive sanctions. Our hypothesis is that one of the factors explaining this situation lies in the perceptions and practices of legal actors regarding ecological damages, particularly magistrates. This study aims at observing in which sociological context this law is building up and, more precisely, at analyzing how legal actors concretely apprehend ecological damages through water and aquatic environment cases. The ecological damage is here addressed not through law but through sociology of law and justice. A plurality of social science methods have been used (documentary work, interviews, and hearing observations, mainly). This report will allow the reader to get the measure of the (limited) place that occupies environmental issues in the everyday work of the magistrates, to better understand the inner workings of the (differentiated) construction and implementation of environmental penal policies at the local level, and finally to grasp the main ins and outs of the production of judgment in ecological damage cases.; La notion de dommage écologique renvoie aux atteintes objectivement constatables portées à la nature. Cette notion, comme celle de préjudice écologique (qui marque le passage du fait au droit avec, en arrière-plan, l’idée de réparation), occupent une place croissante dans le droit européen et français. Dans le cas français, l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 30 mars 2010 rendu dans l’affaire de l’Erika s’inscrit dans un mouvement jurisprudentiel amorcé depuis longtemps, essentiellement par le juge pénal. Par ailleurs, dans le domaine plus spécifiquement de l’eau et des milieux aquatiques, l’article 23 de la directive-cadre européenne sur l’eau de 2000 précise que le droit doit comporter un ensemble de mesures conduisant à des sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives ». Plusieurs rapports publics suivront, en France, recommandant d’accroitre l’effectivité du droit de l’eau en accentuant la répression des infractions en la matière. Notre interrogation de départ consiste à mieux comprendre ce décalage entre des préconisations visant à renforcer la répression des atteintes à l’eau et aux milieux aquatiques et une réalité faite de sanctions peu nombreuses et peu dissuasives. Notre hypothèse est que l’un des facteurs explicatifs de cette situation est à rechercher dans les perceptions et les pratiques des acteurs judiciaires, et en particulier des magistrats, à l’égard des dommages écologiques. Cette étude vise ainsi à observer dans quel contexte sociologique se déploie ce droit en construction et, plus précisément, à analyser comment les acteurs judiciaires appréhendent, concrètement, les dommages écologiques à partir de cas d’atteinte à l’eau et aux milieux aquatiques. Le dommage écologique est ici abordé non pas par le droit mais par la sociologie du droit et de la Justice, à travers une pluralité de méthodes en sciences sociales (travail documentaire, entretiens et observations d’audiences, principalement). Ce rapport conduira notamment le-la lect-eur-rice à prendre la mesure de la place (limitée) qu’occupe l’environnement dans le quotidien professionnel des magistrats, à mieux comprendre les rouages de la construction et de la mise en oeuvre (différenciée) des politiques pénales environnementales au niveau local, et enfin à saisir les principaux tenants et aboutissants de la production du jugement dans les affaires de dommages écologiques.