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'Qui bon i vont, mal en revenent'. la pratique du bannissement épique aux XIIe-XIIIe siècles : triomphe de la violence et échec du droit

Authors :
Jérôme Devard
Centre d'études supérieures sur la fin du Moyen Âge (CESFIMA)
Pouvoirs - Lettres - Normes (POLEN)
Université d'Orléans (UO)-Université d'Orléans (UO)
Centre d'Etudes Supérieures de Civilisation médiévale (CESCM)
Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Université de Poitiers
Philippe Haugeard
Muriel Otto
Source :
Jérôme Devard, Colloque éponyme organisé par l'ILLE, Institut de recherche en langues et littératures européennes, Colloque éponyme organisé par l'ILLE, Institut de recherche en langues et littératures européennes, Mar 2012, Mulhouse, France. pp.91-104

Abstract

ISBN : 978-2-8124-0969-1; International audience; Dans littérature épique, singulièrement dans la Geste de Charlemagne et le Roman de Renart, le retour à la concorde sociale se fait généralement par la mort de l'une des parties. Cependant, nous pouvons y rencontrer deux autres modes de règlement, moins fréquents par rapport aux deux premiers : la transaction financière et surtout l'exil. En l'absence de prison répressive, le bannissement a constitué jusqu'au XVIe siècle le seul moyen de débarrasser la contrée d'un individu dangereux sans le tuer. Aussi bien dans la Geste de Charlemagne que dans le Roman de Renart, la peine de l'exil est prononcée de manière non négligeable. Elle peut prendre la forme d'un bannissement pur et simple ou celle d'un pèlerinage expiatoire ; que ce soit sous l'une ou l'autre forme, le résultat escompté reste le même : se débarrasser d'un individu dangereux ayant agi contre la paix publique ou/et les intérêts de la royauté. Tel qu'il apparaît dans les cycles étudiés, le bannissement peut être à temps, comme dans Girart de Roussillon ou perpétuel. Parfois, comme dans Huon de Bordeaux, l'exil perpétuel est travesti en une mission quasi impossible qui subordonne le retour du délinquant à sa réalisation. Perçu comme une peine d'exclusion et conçu comme un moyen de ramener la concorde sociale au sein de la communauté, le bannissement est présenté comme une technique juridique inefficace et périlleuse. En effet, loin de stopper la violence initiale, cette décision judiciaire l'accentue. Loin de ramener la concorde civile, la peine judiciaire du bannissement peut être le détonateur d'un cycle de vengeance qui consacre le triomphe de la violence et de l'échec du droit. Cependant plus qu'un témoignage de la pratique du bannissement, ces textes portent un regard critique sur le pouvoir royal, dans sa fonction judiciaire. En effet, le retour des bannis est essentiellement justifié par le contexte du prononcé de la sanction. À de rares exceptions, les motivations royales fondant la peine sont biaisées ou injustifiées. Afin de ne pas voir triompher l'injustice flagrante, le retour des bannis est nécessaire pour rétablir non plus la concorde sociale, mais l'ordre juste, brisé par la sanction judiciaire : quand la justice royale est corrompue, la justice divine se doit de prendre le relais, en ramenant les individus de leur exil sain et sauf.

Details

Database :
OpenAIRE
Journal :
Jérôme Devard, Colloque éponyme organisé par l'ILLE, Institut de recherche en langues et littératures européennes, Colloque éponyme organisé par l'ILLE, Institut de recherche en langues et littératures européennes, Mar 2012, Mulhouse, France. pp.91-104
Accession number :
edsair.doi.dedup.....942f405eb3a0fb2901c9f96483d678e9