L’article propose, à partir de l’étude d’un corpus de films documentaires sur l’agriculture contemporaine, de montrer comment la narration filmique met en exergue la bipartition du monde agricole. Il y aurait d’une part, un univers agro-industriel lié à des multinationales et à un capitalisme ultralibéral « scalable » dénoncé dans les films pour ses méfaits internationaux en termes de sécurité alimentaire, de santé publique et d’atteinte à la terre nourricière. D’autre part, une narration qui traite des alternatives en agriculture (biologique, en circuits courts, labellisée, …), qui oriente les films vers des principes de justice et de bien être alimentaire, de responsabilité envers la terre et le travail des humains. Il s’agit alors, dans les scénarios filmiques, soit de dénoncer les milieux des politiques de développement portées par la globalisation agroalimentaire soit de valoriser des formes agricoles « péricapitalistes », en montrant en acte par des savoirs situés, les processus de relocalisation agricole. Mais, il s’avère que ces deux formes narratives ne traitent pas de la complexité des mondes agricoles contemporains. Pour en rendre compte, il s’agit, sans doute, de réinscrire, interactivement, dans la narration filmique, les particularités des lieux, des modes de vie et des milieux socio-professionnels et écologiques, tout en montrant leurs tâtonnements et leurs interrogations. Elles sont inhérentes à la production agricole, de part et d’autre des modèles auxquels on se réfère et animent, certes bien différemment, l’inventivité des mondes agricoles dans les nords comme dans les suds. Certains films s’essaient à la mise en image de ces dépassements et vise à narrer la connectivité des différents modèles agricoles, tout en ne niant pas, que la « scalabilité » économique gouverne peu ou prou aussi les formes « péricapitalistes »., This paper aims, through an analysis of a series of documentaries, at underlining how their storytellings examplify the dual nature of the agricultural world. On the one hand, some documentaries condemn a world of agro-industry linked to international firms and ultraliberal and « scalable » capitalism and in particular for their implications in problems of food security, public health and misuse of the soil resource. On the other hand, some documentaries celebrate agricultural alternatives (organic farming, CSA, …) for their orientation toward food justice, social responsability for the Earth and Human labor. In documentary’s scenarios, it is either the case to condemn political milieux specialized in development matters, and supported by agrifood globalization, or it is the case to emphasize « pericapitalist » agricultural models, shown through situated acting knowledge and agricultural relocalizations. But these two narratives don’t tackle the complexity of contemporary agricultural worlds. To properly account for this complexity, the narratives should restaure, interactively, the peculiarities of locations, forms of life and socio-professional and ecological milieux, while accounting for their incremental nature. These dimensions are common to farming, whichever model is considered, and fuel, distinctively for each model, the innovation potential from the Norths and the Souths. Several movies make visible these overflows and the necessary connection between agricultural alternative models, without denying that economic « scalability » governs also the « pericapitalist » forms of farming.