Le secteur bancaire francais, et plus specifiquement la banque mutualiste, doit aujourd’hui faire face a une evolution paradoxale. A l’origine (1970-1980), les banques mutualistes, etaient considerees comme « des institutions ou l’argent etait un outil au service du lien social ; et leur principe s’orientait vers la solidarite (les principaux clients etaient des ouvriers et des artisans) » (1). Cette periode est caracterisee par le developpement des actions marketing. Les evolutions economiques et sociales se traduisent par la bancarisation des clients potentiels. La banque possede, a cette epoque, une image de « service public bancaire ». A partir des annees 1980, l’introduction de la libre concurrence entre les banques (loi de 1984) et la disparition de l’encadrement du credit modifient le rapport a l’argent. Parallelement, les produits et services financiers (P.E.L, P.E.A, P.E.P, le conseil relatif aux placements) proposes se developpent et les publics vises s’elargissent (credits aux clients particuliers et aux clients professionnels). Face a cette concurrence accrue, le principe de solidarite ne constitue plus un element de differenciation pour ces banques. Les clients deviennent progressivement mefiants vis a vis des banques en general et ils sont de plus en plus multi-bancarises. Les annees 1990 ont ainsi marque la recherche d’une necessaire reconciliation entre la banalisation du metier bancaire et la « reconquete » de la confiance du client. Aujourd’hui, les banques cherchent a reconstruire cette relation de confiance avec leurs clients, a partir de leur reputation (image de l’enseigne) et plus precisement d’une reference a un usage « honnete voire humain de l’argent de leurs clients ». Cette confiance s’inscrit dans le cadre d’une approche relationnelle et dynamique qui vise a etablir et entretenir des relations sur le long terme (2). Parallelement, la multiplication des affaires scandaleuses (ex : Credit Lyonnais) ne fait que renforcer un climat de mefiance. Face a ces evolutions, les institutions bancaires ont compris qu’il etait necessaire de reconcilier leurs imperatifs economiques avec la creation d’une veritable relation de confiance « qualitative » avec leurs clients. C’est ainsi que ce concept est devenu progressivement un outil strategique dans les discours publicitaires de certaines enseignes (Credit Lyonnais, Banques Populaires, Caisse d’Epargne, etc.). Ces discours de confiance semble necessaire mais ne suffisent pas pour construire une veritable relation et fideliser les clients. Ces evolutions soulevent plusieurs interrogations au sein des banques : comment se construit la confiance dans la realite des relations entre un client et sa banque ? que signifie la confiance pour les clients d’une banque mutualiste ? quels elements interviennent sur la construction et l’evolution de la confiance ? existe-t-il une relation de confiance plutot institutionnelle (relation client/banque) ou interpersonnelle (relation client/conseiller de clientele) et, si oui, pourquoi ? Afin de repondre a ces questions, nous avons mene une etude exploratoire, s’appuyant sur dix-huit entretiens retrospectifs realises aupres des clients d’une banque mutualiste. Ces entretiens relatifs a l’histoire de la relation des clients avec leur banque, depuis la naissance de cette relation jusqu’a nos jours, ont permis : -d’identifier comment les clients percoivent la confiance dans la relation avec leur banque (les conceptions) ; -d’identifier les elements intervenant sur la mise a l’epreuve et donc les mecanismes de construction de la confiance au cours de la relation bancaire (identification et gestion des incidents critiques) ; -de verifier l’existence d’une confiance interpersonnelle ou institutionnelle dans la relation bancaire ; Les donnees recueillies ont fait l’objet de deux traitements complementaires : une analyse de contenu thematique et une analyse des evenements dans le discours des clients (identification des evenements critiques positifs et negatifs dans « l’histoire de la vie bancaire » du client, caracteristiques de ces evenements, la gestion des evenements negatifs par le client et par la banque, et les consequences des evenements sur la perception et le comportement du client). Cet article propose donc, dans sa premiere partie, de justifier et presenter une approche dynamique de la construction de la confiance dans la relation client-individuel/banque. Une deuxieme partie, rend compte de l’etude exploratoire menee aupres de dix-huit clients d’une banque mutualiste. Elle expose les resultats, les limites de l’etude et les pistes de reflexion envisagees.