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Ce volume, issu d’une réflexion collective menée par une équipe scientifique principalement franco-espagnole, est consacré à la question des savoirs experts et des techniques de l’expertise en matière économique au Moyen Âge. Les promoteurs ont privilégié deux approches, sociale et institutionnelle d’une part, culturelle et technique de l’autre. Certains personnages sont détenteurs d’un savoir particulier qui les met en situation de pouvoir dire ce que valent les choses. Tous ont une histoire : ils appartiennent à des institutions, ont des expériences professionnelles et des parcours qui construisent et consolident les compétences et les savoir-faire qui fondent leur expertise. Ils laissent des traces écrites, souvent difficiles à retrouver mais entretiennent toutefois avec l’écriture un rapport constant. Les apports de leur enquête doivent en effet être formalisés et ils trouvent leur place dans des textes souvent élaborés. Les experts effectuent un travail technique qui suppose à la fois des gestes et des procédures qui permettent d’estimer et de mesurer ainsi qu’une inscription dans un document qui rende compte et fasse preuve. Este volumen está consagrado a la cuestión de los saberes expertos y las técnicas de peritaje en materia económica durante la Edad Media. Los expertos realizan un trabajo que requiere procedimientos que permitan estimar y medir, así como la escritura de un documento que deje constancia y sirva de prueba. En efecto, los resultados de sus investigaciones deben formalizarse y mantienen así una relación constante con la escritura en textos a menudo muy elaborados.

Les conflits qui interviennent de manière récurrente avec les rois d’Angleterre (et secondairement avec les comtes de Flandre) à partir du règne de Philippe le Bel conduisent au développement progressif, dès les dernières années du xiiie siècle et tout au long du xive siècle, d’une fiscalité royale dite « extraordinaire », qui tend néanmoins à devenir systématique et à n’épargner personne, tant sur les plans juridique et géographique que social, qu’il s’agisse des seigneuries échappant toujou...

Dans le cadre des réunions préparatoires à l'élaboration d'un projet de recherche pluri-annuel, j'ai eu la chance de pouvoir approfondir mes incursions dans le champ culturel en interrogeant la signification de la " mise en liste " des documents fiscaux, composante importante des écrits pragmatiques. Or, il s'avère que le principe de tabularité n'est pas encore pleinement systématique dans la documentation comptable méridionale du XIVe siècle ; en outre, les logiques de classement des items sont variées, pour autant qu'elles existent, car il est également fréquent que la mise en rubrique des différentes entrées cache un amoncellement d'opérations financières, d'individus et de lieux. Enfin, au-delà de considérations pragmatiques, j'ai pu inaugurer une interprétation langagière (application du schéma de Jakobson) de la comptabilité ; le discours de cette dernière assure des fonctions référentielle (narration et description d'opérations financières), conative (convaincre et modeler tant le contribuable que le receveur) et expressive (structuration du rôle politico-administratif de l'émetteur du document).

La question des rapports entre fiscalité municipale et fiscalité étatique a fait l'objet de nombreuses études. Le débat n'a certes pas commencé hier (il a débuté avec les colloques sur la genèse de l'État moderne dirigés par J.-P. Genet, et a été plus récemment illustré par l'ouvrage coordonné par Denis Menjot et Manuel Sánchez Martínez), mais il n'est pas encore totalement éclairci, en raison de la variété des situations géographiques et politiques observées. La question fiscale pose ici le problème des échelles de l'exercice du pouvoir, et des rapports entretenus entre elles (de la simple négociation à l'opposition frontale). Les villes sont ainsi mises en relation pour satisfaire aux demandes de la monarchie (c'est notamment le cas dans les assemblées d'états qui consentent souvent l'impôt) : cette séance du laboratoire s'est demandée si, à partir de cette mise en relation souvent contrainte des villes sur une question précise (et parfois en un lieu donné), peuvent éventuellement se dégager de véritables réseaux pérennes et autonomes. Cette " mise en réseau " potentielle attesterait ainsi de la fiscalité comme une des modalités pratiques de la construction territoriale des principautés.

International audience; Dans cet article, je reviens sur un épisode bien connu de l'histoire méridionale, à savoir la rébellion et la punition par Philippe le Bel de deux villes de la sénéchaussée de Carcassonne en 1303-1304. Cette fronde prend place dans le contexte plus large de la lassitude des citadins du Languedoc " hérétique " devant l'ampleur de la répression inquisitoriale. Plutôt que ces relations entre Méridionaux et inquisiteurs, j'ai tenté de rouvrir le dossier en considérant cette fois le rapport - très ambigu - noué entre les villes et le roi de France. Ce dernier, d'abord sensible aux plaintes des populations citadines, finit par leur opposer une fin de non-recevoir en raison de l'apaisement du contentieux avec la papauté dont les inquisiteurs sont des représentants directs. Cela conduit à une conspiration visant à offrir le Languedoc au roi de Majorque. Ma contribution revient donc, grâce à une étude des arguments basés sur l'utilisation du droit savant, à éclairer les tenants et les aboutissants de la condamnation de deux personnes morales pour crime de lèse-majesté, ainsi que de leur rapide rémission, signe d'un décalage entre théorie et pratique juridiques, un décalage d'où l'intérêt financier de Philippe le Bel n'est pas absent.

Les relations entre villes et campagnes sont l'une des portes de sortie d'une approche par trop auto-centrée de la ville, mais on est loin encore d'en avoir mesuré suffisamment les implications. Les recherches récentes sur le crédit ont permis de mettre en lumière le rôle décisif de celui-ci dans la soumission de plus en plus accentuée des campagnes aux citadins à la fin du Moyen Âge. D'autres aspects comme la réinscription de la ville dans son environnement local et les implications politiques, sociales et culturelles des rapports entre villes et campagnes ont été remis au goût du jour. Cette relation est parfois très complexe, comme l'illustre le cas des notaires qui, à travers leur parcours professionnel et personnel, ont joué un rôle très important de trait d'union entre ville et campagne, mais aussi entre société et administration, entre les particuliers et le droit, entre latin et langue vernaculaire... Dans un domaine plus strictement matériel, la percée des études " environnementales " pourront permettre d'examiner comment les villes aménagent le territoire environnant, considéré de plus en plus comme une ressource devant " nourrir " la ville.

Poursuivant mon exploitation des rôles de fouages et des listes de feux, j'ai pu évaluer la place des villes dans le système fiscal qui, sinon se met en place, du moins s'alourdit sous la pression du roi au début de la guerre de Cent ans. Cette place est plus que favorable : les principales villes de la sénéchaussée de Carcassonne (Narbonne, Carcassonne, Béziers, Limoux, Albi...) bénéficient souvent d'abattements qui viennent s'ajouter à une première réduction plus difficile à évaluer (quoiqu'elle soit incontestable) dans la fixation du nombre de leurs feux.

Actes de la session éponyme tenue lors de la Xe Conférence internationale d'histoire urbaine (Gand, septembre 2010)

National audience; Comme son titre l'indique, l'entretien que Françoise Autrand et Bernard Guenée nous ont fait l'honneur de nous accorder se propose, à partir de la publication de l'un des derniers ouvrages de Bernard Guenée, d'explorer les problèmes politiques posés par la folie du roi Charles VI, et d'éclairer grâce à ces derniers la signification profonde d'un pouvoir sacralisé à un point tel qu'il ne viendrait à l'idée de personne de renverser le souverain - un souverain sans doute plus utile sur son trône pourvu qu'il serve d'otage aux intérêts qui s'opposent alors dans la société politique au temps de la guerre de Cent ans -, contrairement à ce qui s'observe en Angleterre à peu d'intervalle avec Henri VI.