Les études récentes sur Synesius de Cyrène rejettent de plus en plus la thèse traditionnelle qui le considérait comme un nouveau venu dans le christianisme, pour le considérer plutôt comme un chrétien flexible et antidogmatique. Cependant, tout en reflétant notre meilleure compréhension de l’expérience de la religion vécue à la fin de l’Antiquité, cette position néglige un aspect crucial de l’identité religieuse de Synesius: son auto-récit. À travers une étude des stratégies rhétoriques utilisées par Synesius pour communiquer son allégeance religieuse, cet article soutient que Synesius a plutôt cherché des moyens de se présenter comme un concurrent du christianisme et de ses représentants les plus éminents. Le « sophiste » Synesius (défini comme tel en dépit, ou mieux, en vertu de ses prétentions à ne pas en être un), caractérisé par la recherche d’une identité oppositionnelle construite à l’aide de la rhétorique traditionnelle, apparaît ainsi comme incarnant la tension entre innovation et continuité qui marque la Troisième sophistique au IVe siècle.