Brasseur, Pierre, Thomé, Cécile, Jakšić, Milena, Pacte, Laboratoire de sciences sociales (PACTE), Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Université Grenoble Alpes (UGA)-Sciences Po Grenoble - Institut d'études politiques de Grenoble (IEPG), Université Grenoble Alpes (UGA), Institut national d'études démographiques (INED), Institut des Sciences sociales du Politique (ISP), and Université Paris Nanterre (UPN)-Université Paris-Saclay-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Ecole Normale Supérieure Paris-Saclay (ENS Paris Saclay)
International audience; The social sciences have long considered sexuality as an object that is either illegitimate or that allows, in the same way as love, the "suspension of force and power relations". Its analysis has then struggled to detach itself from common sense, and sexuality has often played the role of an abstract referent, supporting theoretical conceptualization without any objective empirical basis. In contrast, researchers in the social sciences of sexuality maintain that it is essential to "de-exceptionalize" its study (Bozon, 2020), to contextualize it within "scripts" or fundamentally social "frameworks", refusing "to interpret sexual conduct as the result of an opposition between a natural sexual drive and a social law, which would function as a repressive principle". Analyzing sexuality, therefore, presupposes, in the first place, being able to talk about it. The emergence of social sciences of sexuality thus implies the possibility of "saying sexuality". This is necessary first of all in the interview situation since both the interviewer and the respondent must be able to express themselves on this subject. However, it is also necessary for the social relations it appears, from the most intimate to those between patients or users and professionals (in the health, social or legal fields) who are called upon to discuss it. Therefore, this issue is devoted to contemporary ways of "talking about sexuality" in social interactions and in the survey itself.; 1La sexualité a longtemps été considérée par les sciences sociales comme un objet soit illégitime, soit permettant, de la même manière que l’amour, la « mise en suspens de la force et des rapports de force » (Bourdieu, 1998 : 149). Son analyse a alors peiné à se détacher du sens commun et la sexualité a souvent pu jouer le rôle de référent abstrait, servant d’appui à la conceptualisation théorique sans véritable assise empirique (Bourdieu, 1994). Les chercheur·se·s en sciences sociales de la sexualité soutiennent à l’inverse qu’il est indispensable de « désexceptionnaliser » son étude (Bozon, 2020), de la contextualiser dans des « scripts » (Gagnon et Simon, 1973 ; Gagnon, 2008) ou des « cadres » fondamentalement sociaux, refusant « d’interpréter la conduite sexuelle comme le résultat d’une opposition entre une pulsion sexuelle naturelle et une loi sociale, qui fonctionnerait comme principe répressif » (Bozon, 2001 : 5). Analyser la sexualité suppose alors, en premier lieu, de pouvoir en parler. L’émergence de sciences sociales de la sexualité implique ainsi la possibilité de « dire la sexualité ». Cela est d’abord nécessaire dans la situation d’entretien, enquêteur·rice et enquêté·e devant pouvoir s’exprimer à ce sujet ; mais cela l’est aussi dans les relations sociales où elle apparaît, des plus intimes à celles entre patient·e·s ou usager·e·s et professionnel·le·s (de la santé, du social ou encore de la justice) amené·e·s à l’évoquer. C’est donc aux modalités contemporaines de « dire la sexualité », tant dans les interactions sociales que dans l’enquête elle-même, qu’est consacré ce dossier.