Objectif La presence d’ethanol apres un deces est souvent observee lors des analyses toxicologiques, et sa recherche revet une certaine importance pour evaluer le degre d’intoxication du defunt peu avant le deces et sa capacite d’agir. En outre, le rapport des concentrations entre les differentes matrices biologiques permet generalement de pouvoir determiner si l’ethanol a ete consomme avant le deces ou s’il provient d’une formation post mortem. Pour une consommation d’ethanol avant le deces, cela permet egalement de determiner dans quelle phase toxicocinetique le deces est survenu. Nous rapportons le cas d’un deces survenu par pendaison complete presentant une distribution atypique de l’ethanol dans les echantillons post mortem. Methode Le corps d’un homme de 49 ans est retrouve pendu sur son lieu de travail. L’autopsie, realisee 24 heures plus tard, a confirme l’hypothese d’un deces survenu suite a une asphyxie mecanique par pendaison complete, et des analyses toxicologiques sont demandees dans le but d’evaluer l’etat de la personne au moment du deces. Une forte odeur aromatique de la cavite abdominale a ete signalee lors de la dissection et l’estomac presentait une paroi de consistance ferme, de coloration brunâtre, comme « fixee » dans un liquide de conservation. Des analyses toxicologiques ont ete effectuees sur l’urine, a l’aide d’une batterie de tests de depistage, et d’un screening par CPG-SM apres hydrolyse, extraction basique et sylilation. Dans le sang, un screening general a ete effectue par CPL-SMHR. Le dosage de l’ethanol et des substances volatiles a ete effectue par HS-CPG-DIF. Le dosage de l’ethylglucuronide, de l’ethylsulfate et du phosphatidylethanol a ete effectue par CPL-SM. Resultats Mis a part la presence d’ethanol, de cafeine, de metabolites de la cafeine, de nicotine, et de metabolites de la nicotine, les analyses n’ont pas mis en evidence la presence de substance susceptibles de diminuer la capacite de decision ou d’action. La concentration de l’ethanol dans les cinq echantillons de sang femoral (veine iliaque) variaient de 1,53 a 2,04 g/kg, alors que dans l’urine et l’humeur vitree, la concentration d’ethanol etaient inferieure a 0,10 g/kg. Dans les autres echantillons, les concentrations d’ethanol etaient les suivantes : sang cardiaque (1,73 g/kg), serum femoral (2,61 g/kg), muscle squelettique (psoas) (5,00 g/kg), muscle cardiaque (1,12 g/kg), liquide pericardique (6,24 g/kg), foie (0,26 g/kg), bile (54 g/kg), cortex cerebral (0,14 g/kg), liquide cephalorachidien (0,21 g/kg), et dans le contenu gastrique (168 g/kg, ou environ 17 %, ou environ 67 g d’ethanol pur pour 400 g de contenu gastrique). La presence d’ethylglucuronide dans les echantillons biologiques analyses, en particulier dans les cheveux (24 pg/mg sur un segment de 5 cm), ainsi que d’ethylsulfate et de phosphatidylethanol (500 ng/ml dans le sang femoral) a ete mise en evidence. Dans le contenu gastrique, du 1-propanol (environ 130 mg/l) et de l’isobutanol (environ 71 mg/l) ont ete mis en evidence. Conclusion La distribution atypique de l’ethanol dans les echantillons biologiques parle en faveur d’une prise d’une dose massive d’ethanol dans les minutes avant le deces, ainsi que d’une diffusion post mortem importante de l’ethanol depuis le contenu gastrique. Des lors la concentration d’ethanol mesuree dans le sang femoral doit etre interpretee avec precaution, car elle ne correspond certainement pas a celle qui aurait pu etre relevee au moment du deces, qui devait etre nettement plus faible, tres vraisemblablement de l’ordre de quelques dixiemes de g/kg. Ces resultats soulignent l’importance de mesurer la concentration de l’ethanol dans plusieurs echantillons post mortem lorsqu’il est mis en evidence dans le sang, afin de mettre en evidence d’eventuels artefacts lies au processus de redistribution post mortem. more...