Cet article pose la question de la modernité du temps protestant. Il cherche à montrer que cette modernité s’est heurtée à de nombreuses résistances : refus du nouveau calendrier, longue subsistance de l’observation des fêtes traditionnelles, etc. D’autre part, le temps protestant est resté un temps chrétien, marqué par un début et une fin, que les théologiens ont longtemps cherché à dater précisément. Il ne se distingue par conséquent guère du temps catholique ; les différences n’apparaissent que marginalement sans que cela soit pour autant insignifiant. Quoi qu’il en soit, moins qu’une sécularisation du temps avec des jours qui auraient tous la même valeur c’est plutôt un nouvel ordre du temps qui se fait jour, avec l’importance grandissante du dimanche, avec la valorisation de certaines fêtes, avec des moments exceptionnels comme les jours de jeûne et avec cette année rythmée par les quatre cènes annuelles. En fin de compte, la principale contribution du protestantisme des xvie-xviiie siècles à la modernité est peut-être la valorisation de la maîtrise du temps, l’idée que le temps est un bien qu’il ne faut pas perdre, qui peut même faire gagner de l’argent. Ce temps qui s’inscrit dans le déclin d’un monde vieux – du moins est-ce ainsi qu’on le voit à la Renaissance – est un temps où il faut sans cesse faire effort pour se conformer au plan divin ; il ne faut donc pas le gâcher, le gaspiller dans des activités futiles ou dans l’oisiveté. Sans doute est-ce sur ce seul point qu’il se révèle très moderne, mais c’est décisif pour accompagner et favoriser le développement du capitalisme. This article raises the question of the modernity of Protestant time. It tries to show that this modernity has met with many resistances: refusal of the new calendar, long subsistence of the observation of traditional festivals, etc. Moreover, Protestant time remained a Christian time, marked by a beginning and an end, which theologians have long sought to date precisely. It is therefore hardly different from Catholic time; the differences appear only marginally, although this is not insignificant. In any case, less than a secularization of time with days that would all have the same value, it is rather a new order of time that is emerging: growing importance of Sunday, enhancement of certain festivals, exceptional moments such as fasting days and the four Last Supper Days. Finally, perhaps the main contribution of 16th-18th century Protestantism to modernity is the value of time control, the idea that time is a good that should not be wasted, which can even save money. This time, which is part of the decline of an old world - at least as we see it in the Renaissance - is a time when we must constantly make an effort to conform to the divine plan; we must not waste it in futile activities or in idleness. Undoubtedly, it is on this point alone that it is very modern, but it is decisive in accompanying and promoting the development of capitalism. Este artículo plantea la cuestión de la modernidad de los tiempos protestantes. Busca demostrar que esta modernidad, a lo largo del tiempo, ha encontrado mucha resistencia: rechazo del nuevo calendario, persistencia en la observancia de fiestas tradicionales, etc. Por otro lado, el tiempo protestante siguió siendo un tiempo cristiano, marcado por un principio y un final, que los teólogos han buscado fechar con precisión. Por lo tanto, apenas difiere de los tiempos católicos; sin ser insignificantes, las diferencias aparecen marginalmente. Sea como fuere, se trata menos de una secularización del tiempo marcada por días que tendrían todos el mismo valor, que de un nuevo orden temporal emergente: creciente importancia del domingo, valoración de ciertas celebraciones, momentos excepcionales como los días de ayuno y el año marcado por las cuatro cenas anuales. Al final, tal vez la principal contribución del protestantismo de los siglos XVI a XVIII a la modernidad es la valoración del dominio del tiempo, la idea de que el tiempo es un bien que no debe perderse, que incluso puede hacer ganar dinero. Este tiempo de la decadencia de un viejo mundo, al menos así se lo ve en el Renacimiento, es un tiempo caracterizado por un esfuerzo constante destinado a ajustarse al plan divino. Se trata por ende de un tiempo que no debe desperdiciarse en actividades inútiles o en inactividad. Es sin duda en este único punto que resulta muy moderno, único aunque decisivo para acompañar y favorecer el desarrollo del capitalismo.