Dans la foulée des évènements de Mai-Juin 1968, de la grève générale et de la révolte étudiante, le gouvernement gaulliste accepte de céder aux revendications des étudiants contestataires en créant une université sur le modèle qu’ils réclament. Interdisciplinaire, ouverte aux travailleurs et complètement autogérée cette université sera le Centre Universitaire Expérimental de Vincennes (C.U.E.V.) qui sera le foyer de l’intelligentsia française, accueillant notamment Deleuze, Guattari, Lyotard et plusieurs autres philosophes de renom au sein de son département de philosophie qui fut fondée et dirigée par nul autre que Michel Foucault de 1968 à 1970. Ce sont ces conditions qui sont à l’origine de la philosophie postmoderne, conditions desquelles émergeront une nouvelle théorie et une nouvelle pratique de la philosophie : La philosophie de Vincennes. L’objectif de ce mémoire est de savoir quelle est l’essence de la philosophie de Vincennes. Et en quoi se trouve-t-elle à l’origine du postmodernisme ? Le présent projet de mémoire se divise en trois parties selon trois approches : historique, pédagogique et philosophique. I) La partie historique retrace l’Histoire de Vincennes en cherchant le développement chronologique de cette nouvelle philosophie ainsi que les évènements historiques qui ont contribué à la forger. On retracera l’histoire de l’université de sa création en 1968 jusqu’à sa destruction par le maire de Paris Jacques Chirac en 1980. II) Une partie pédagogique qui discute des innovations pédagogiques de Vincennes et des impacts qu’elles ont eu sur les philosophes qui y ont enseignés. Ces innovations sont : 1) la création des Unités de Valeur (UV) ; 2) la pluridisciplinarité ; 3) le regroupement d’une faculté d’enseignement et d’un centre de recherche ; 4) l’autogestion et 5) l’ouverture aux travailleurs. III) La partie philosophique, la plus longue, traitera trois aspects communs à ces auteurs (Foucault, Deleuze, Lyotard). À savoir, la critique de la conception moderne de l’homme comme 1) libre et 2) rationnel, et la critique de la notion moderne de progrès. 1) La liberté n’est plus constitutive de l’homme qui est désormais vu comme déterminé par ses pulsions (héritage Freudien et Lacanien) et des superstructures (héritage Marxiste et Althussérien). 2) La rationalité n’est plus l’essence de l’homme, on critique ceux qui s’en servent comme norme pour punir ceux qui s’en éloignent, notamment dans l’Anti-Œdipe de Deleuze, ou l’Histoire de la Folie de Foucault. 3) La notion de progrès, typique de la philosophie moderne, est critiquée, notamment à travers la critique des grands récits métahistoriques, comme chez Lyotard. Ces trois approches ont pour but de nous permettre de mettre à jour l’essence de la philosophie de Vincennes et du postmodernisme, c'est à dire de la philosophie contemporaine., In the midst of the events of May-June 1968, of the general strike and the student revolts, the Gaullist government accedes to the students’ demand by creating a new university on the very model they demand. Interdisciplinary, open to the workers and completely self-governed, this university will be called the Centre Universitaire Expérimental de Vincennes (C.U.E.V.) which will become the home of the French intelligentsia, welcoming, among others, Deleuze, Guattari, Lyotard, and many more within the philosophy department which was founded and directed by none other than Michel Foucault from 1968 to 1970. It is those very conditions which were at the origin of postmodern philosophy, conditions from which a new theory and a new practice of philosophy will emerge: Vincennes philosophy. The goal of this thesis is to describe and determine this philosophy. How it is that it stands the origin of postmodernism? In order to respond to this question, this thesis is divided into three parts following three distinct of approaches: historical, pedagogic and philosophical. I) The historical part will follow the history of Vincennes while looking for the chronological development of the new philosophy as well as the historical events which contributed to its birth. We will follow the story of the University from its creation in 1968 to its destruction by the Mayor of Paris, Jacques Chirac, in 1980. II) The pedagogic part will focus on the teaching innovations of Vincennes and on the impact they had on the various philosophers who taught there. Those innovations include: 1) the creation of the Value Units (VU) ; 2) interdisciplinarity ; 3) the combination of research and teaching ; 4) self-government and 5) workers’ admission. III) the philosophical part, the longest, will discuss aspects common to the aforementioned three philosophers (Foucault, Deleuze, Lyotard). That is to say, the critique of the modern conception of man as 1) free and 2) rational, and the critique of the modern notion of progress. 1) Freedom will no longer be considered a dimension of man who is henceforth seen as determined by his bodily drives and impulses (a heritage of Freud and Lacan) and by superstructures (the heritage of Marx and Althusser). 2) Rationality no longer typifies the essence of man either; the philosophers examined critique those who use rationality as a norm to punish those who deviate from it, especially in Deleuze’s Anti-Œdipus, or in Foucault’s Madness and civilization. 3) The notion of progress, a common idea in modern philosophy, will also be criticized, especially through the critical analysis of metahistorical narratives, as found in Lyotard, for example. The goal of these three approaches is to uncover the essence of Vincennes philosophy and with it, postmodernism, which is to say, that of contemporary philosophy.