1. Le boom de la quinoa dans l'Altiplano sud de la Bolivie : bouleversement du système agraire, discours et tensions socio-environnementales : synthèse en français suivie de la thèse en espagnol
- Author
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Vieira Pak, M.
- Subjects
RENDEMENT ,GESTION FONCIERE ,INNOVATION ,QUINOA ,PRODUCTIVITE AGRICOLE ,INDIVIDUALISATION ,PRATIQUE CULTURALE ,CONFLIT SOCIAL ,PLANTE CULTIVEE ,SYSTEME AGRAIRE ,MODERNISATION ,CHANGEMENT SOCIAL ,STRATEGIE PAYSANNE ,DEGRADATION DU SOL ,DEVELOPPEMENT RURAL - Abstract
La mondialisation de la production de la quinoa (Chenopodium quinoa Willd.), initiée dans les années 80 dans l’Altiplano Sud de la Bolivie, a profondément bouleversé le système agraire de cette région. Parmi les acteurs de la filière (producteurs, organisations professionnelles, importateurs) et ceux qui lui sont associés (gestionnaires, agents de développement, chercheurs), ces changements ont fait émerger des questionnements sur la durabilité de la production, principalement centrés sur une dégradation des sols dont la baisse des rendements agricoles serait l'indicateur le plus fiable. Cette perte de productivité des sols appellerait un changement urgent des pratiques agricoles au sein des communautés rurales, passant notamment par diverses innovations agro-techniques. Cette étude a identifié les transformations agraires liées au passage d’une agriculture de subsistance à une agriculture d’exportation. Elle s’appuie sur des différentes voies d'approche allant de l'analyse des systèmes agraires, à l’écologie politique et à la théorie de l'action collective, et traversant plusieurs échelles temporelles et spatiales depuis le parcours de vie individuel jusqu'à l'histoire régionale des dernières quarante années. En utilisant des outils méthodologiques tels que les jeux de rôles, l'observation participante et la réalisation d’entretiens au sein de quatre communautés rurales représentatives, nous avons mis en évidence que la dégradation des sols a été mise en avant par un discours agro-technique diffusé par certains acteurs de la filière, sans fondement scientifique sérieux et en négligeant les interactions complexes de facteurs environnementaux et techniques, mais aussi sociaux et politiques, pouvant expliquer la faible productivité agricole. Ce discours occulte notamment les enjeux cruciaux liés à la gestion individuelle et collective des ressources territoriales, profondément transformée par l'essor de la quinoa. Ce travail démontre aussi le manque d'articulation des actions de recherche et de développement autour des modes de gestion communautaires des ressources. Il signale ensuite l'inadaptation des pratiques actuelles de culture aux conditions agroécologiques des nouvelles zones de production et l’insuffisance des normes de certification biologique pour assurer la durabilité de la production. Il révèle enfin l’apparition de tensions liées aux nouvelles formes d’accès et d’usages des terres, dans un contexte où la gestion communautaire des activités agricoles et des ressources foncières s'est progressivement affaiblie, et où la pluriactivité et la mobilité restent des pratiques généralisées parmi les producteurs de quinoa. A partir de ces analyses, nous concluons qu’il n’existe pas une cause unique à la faible productivité des cultures de quinoa, mais plutôt un faisceau de facteurs environnementaux, techniques et sociaux en interaction complexe. Si certaines solutions aux problèmes agro-environnementaux doivent passer par la construction d’accords collectifs et un renouvellement de la gestion concertée de l'espace agricole, la crise territoriale doit aussi être abordée en prenant en compte les processus sociaux, institutionnels et politiques liés à la production de quinoa.
- Published
- 2012