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Cet article propose une analyse détaillée du rituel pratiqué en Languedoc et en Provence au moment de la prestation d'un serment de fidélité. Concurremment à l'hommage, qui est attesté à partir, au moins, du dernier tiers du XIe siècle, il existait en effet un rituel propre aux serments. Un certain nombre de serments, les plus proches de l'oralité occitane, en ont conservé des traces dans leur formulaire. Ils nous permettent e reconstituer quatre temps forts de l'engagement. Le rituel s'ouvrait par une interpellation, à la fois réelle et symbolique. Puis chacun des protagonistes, prestataire et récipiendaire du serment énonçait son identité en citant le nom de sa mère. troisième élément du rituel, concomitant aux deux premiers, est le serrement des mains. Le seigneur et le vassal se serrent une main, certainement la main droite. Dernier élément, le vassal étendait sa main sur des res sacrae (autel avec des reliques, ou texte des Evangiles) pour garantir son serment. Le serment et son rituel sont un précipité de rites et d'usages antérieurs où se mêlent des traditions de l'entrée en dépendance de l'antrustion ou de rites militaires (la main droite armée), et de rites issus des serments publics du haut Moyen Âge ou même des serments de Paix de Dieu (le rôle des res sacrae). Mais à côté, des formes sont nouvelles : l'interpellation, la filiation maternelle, l'emploi massif de l'occitan. De fait, nous avons à faire dès le XIe siècle à une structure homogène, à un ensemble de rites d'origines diverses réaménagés, réagencés, auxquels est conféré un sens nouveau : l'entrée en fidélité, la conclusion d'un pacte féodo-vassalique et la reconnaissance d'un pouvoir supérieur sur un château qui matérialise le fief.

Cet article est issu de la conférence inaugurale des Journées romanes de Saint-Michel-de-Cuxa, qui eurent lieu en 2004, sur le thème "l'aristocratie, les arts et l'architecture à l'époque romane". Il dresse un tableau de l'aristocratie du Midi de la France à l'extrême fin du XIe siècle. Envisager l'aristocratie vers 1100, c'est faire le point à un moment où celle-ci a profondément changé de visage depuis les temps carolingiens ; il est possible de faire un bilan des mutations opérées depuis 950. Cela m'a permis de mettre en lumière les rapports sociaux qui à la fois fondaient la domination sociale et assuraient la reproduction de cette domination : le pouvoir de l'aristocratie sur le reste de société et le partage de ce pouvoir au sein de l'aristocratie, avec tous les conflits qu'engendraient les stratégies de domination. Cinq phénomènes majeurs m'ont semblé pouvoir caractériser l'aristocratie de la fin XIe siècle, et pour certains, la distinguer du reste de l'Occident.

réédition 2013