Burgat, François, Burgat, François, Institut de Recherches et d'Etudes sur les Mondes Arabes et Musulmans (IREMAM), Sciences Po Aix - Institut d'études politiques d'Aix-en-Provence (IEP Aix-en-Provence)-Aix Marseille Université (AMU)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Centre d'études et de documentation économiques, juridiques et sociales (CEDEJ), MIN AFF ETRANG-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Maison méditerranéenne des sciences de l'Homme (MMSH), Aix Marseille Université (AMU)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Centre Français d'Archéologie et de Sciences Sociales de Sanaa (CEFAS), Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Institut de Recherches et d'Etudes sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM), Aix Marseille Université (AMU)-Sciences Po Aix - Institut d'études politiques d'Aix-en-Provence (IEP Aix-en-Provence)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères (MEAE)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), and Centre Français d'Archéologie et de Sciences Sociales (CEFAS)
The socio-educative background of the incumbent leader of « Tanzim al Jihad », the most revolutionary of Islamist trends to have branched out on the banks of the Nile, does better than reams of discourse in illustrating the danger of an indefatigably “economicist” reading of the phenomenon. A trained surgeon himself and husband to a philosopher, Ayman al Zawahiri is the son of a University Dean and a don. But recapping the family tree of the leader of the organisation which succeeded in assassinating president Anwar Sadate (already then, under seal of approval by a certain ‘alim from Al-Azhar University named Omar Abdurrahman) only goes to emphasize still further how great, in political analysis, is the risk of hair-splitting – however useful this may be at other times – when discussing the different expressions of Islamic religion: Sufi, Azhari or Islamist. On the paternal side, Ayman al-Zawahiri is the grandson of... an Al-Azhar Sheikh (Rabi' Al-Zawahiri) and through his mother (daughter of Abdelwahab ‘Azzam), a Rector of Cairo's University, a late ambassador, but above all... the Sheikh of a Sufi brotherhood! In Egypt, as elsewhere, the use of the “Islamist” label in depicting the relations between society, politics and religion comes up against the eternal problem of definition. In the western view – and not only on the media – it remains wholly negative in connotation, which is far from being the case in the thick of Arab societies. It then tends to reinforce the thesis of a political instrumentalisation of religion to be placed statically and “a-historically” at the Islamists' door, identifying them in dichotomy with other forms of belief. Within the rigid framework of their current definition, the Islamists are indeed “those people who – because development policies have left them by the wayside – instrumentalise Islam as a form of opposition to established political power”. They reputedly do so by basing themselves on an erroneous interpretation of the religious message, at eternal loggerheads with the very social modernisation and political liberalisation which “modernising” regimes and/or “secularized” intellectuals are desperately trying to promote. In Egypt, as elsewhere under Arab skies, the regime itself is attempting more prosaically to establish the existence of an « apolitical » brand of Islam, meaning « non-oppositional », i.e. worthy of its support, the better to eschew a “political” Islam, necessarily « reactionary», « intolerant », if not « terrorist», in any case «anti-modern », which the might of the just and the good would, no frontiers barred, be everywhere invited to combat. The media's representation of Egypt's religious field has set the stage for the grand entry of an “institutional” Islam (University of Al-Azhar, Mufti of the Republic, but also the high-powered official « Télé-preachers ») in the role of non-oppositional, if not « apolitical » gatekeepers of a tolerant, modernist orthodoxy, cheek by jowl with Sufi brotherhoods themselves just as « apolitical », as ideologically hostile to the supporters of the « political » and « reactionary » Islam of the Islamists, etc. A closer scrutiny of the multifarious, ever-changing, often unexpected passage-ways, by which the “different forms of Islam” in reality converge within the dynamics of opposition, but also with the dynamics of social and political modernisation, will no doubt tend to reveal a more dynamic and complex face of reality, whereby the political identity of Al-Azhar and the Sufi brotherhoods in relation to the “Islamist generation”, long considered paradigmatic of a crossover pattern of the religious and the political, tends irresistibly to be subsumed., Le profil socio-éducatif du leader en titre de « Tanzîm al Jihâd », la plus révolutionnaire des formations islamistes nées au bord du Nil , illustre d'abord mieux que de longs discours le danger de l'inusable lecture « économiciste » du phénomène islamiste. Chirurgien de formation et marié à une philosophe, Aïman Dhawâhirî est le fils d'un doyen de faculté et d'une professeur d'université. Mais le rappel des ascendants familiaux du leader de l'organisation qui a réussi à assassiner le président Anwar Sadate (avec, déjà, la caution d'un ‘Alim d'Al Azhar du nom d'Omar Abderahmane) souligne plus encore la fragilité du découpage par ailleurs souvent utile entre « les islams » , soufi, azhari ou islamiste. Par son père , Aïman Dhawâhirî est le petit fils d'un ... cheikh d'Al Azhar ( Rab'î Al Dhawâhirî) et par sa mère, (fille d'Abdelwahab Azzam) d'un recteur de l'université du Caire, ambassadeur mais surtout ...cheikh de confrérie soufi. En Egypte comme ailleurs, la catégorie «islamiste » pose ainsi pour décrire les relations entre société, politique et religion un éternel problème de définition. Dans le regard occidental , pas seulement médiatique, elle demeure connotée de façon uniquement négative, ce qui est très loin d'être le cas dans le tissu des sociétés arabes. Elle tend ensuite à conforter l'idée d'une instrumentalisation en politique des ressources de la religion qui serait l'apanage -statique et « an-historique » - des islamistes et les identifierait par rapport à toutes les autres formes de croyance. Dans le cadre figé de leur définition courante, les islamistes sont en effet « ceux qui - parce que les politiques de développement les ont oubliés- instrumentalisent l'Islam pour s'opposer au pouvoir politique établi ». Ils sont réputés le faire sur la base d'une interprétation du message religieux erronée et comme telle antinomique avec la modernisation sociale et la libéralisation politique que les régimes « modernisateurs » et/ou les « intellectuels laïques » s'efforceraient désespérément pour leur part de promouvoir. En Egypte comme ailleurs en terre arabe, le régime tente plus prosaïquement d'établir l'existence d'un Islam « apolitique », c'est à dire surtout « non oppositionnel » qui justifierait son soutien, pour mieux le démarquer d'un Islam « politique », nécessairement « réactionnaire », « intolérant » voire « terroriste » et en tout état de cause « anti-moderne » que les forces du bien, par delà toutes frontières, seraient naturellement invitées à combattre. La représentation médiatique du champ religieux égyptien a donc longtemps mis en scène à peu de choses près les acteurs d'un islam « institutionnel » (université d'Al Azhar, Mufti de la République mais aussi grands « télé-prédicateurs » officiels) dans le rôle de gardiens non oppositionnels sinon « apolitiques » de l'orthodoxie d'un islam tolérant, moderniste aux côtés de confréries soufis elles mêmes aussi « apolitiques » qu' idéologiquement hostiles aux tenants de l'islam « politique» et « réactionnaire » des islamistes etc. L' examen des passerelles multiples, changeantes, souvent inattendues, par lesquelles « les différents Islams » s'inscrivent en réalité dans les dynamiques oppositionnelles mais également dans les dynamiques de modernisation sociale ou politique révèle une réalité plus dynamique et plus complexe, où la stricte séparation entre les Islam institutionnel d'Al Azhar et des confréries et la génération islamiste, longtemps considérée comme le paradigme obligé de l'étude du croisement entre religion et politique, tend irrésistiblement à se résorber.