Cadre de la recherche : Le Togo, pays à forte tradition commerciale, présente un taux élevé d’activité des femmes. Celles-ci sont encouragées à entreprendre et disposent librement de leurs revenus. Parallèlement, elles ont la charge quasi intégrale du travail domestique. Si la plupart d’entre elles sont cantonnées aux activités informelles, certaines cheffes d’entreprise ont réussi à se faire une place dans la capitale dans des secteurs émergents de l’économie formelle. L’enquête porte sur ces archétypes de l’émancipation féminine par le travail, qui ont fait des études supérieures et qui sont dans des associations qui promeuvent l’entrepreneuriat des femmes et leur empowerment.Objectifs : Cet article explore la manière dont elles adhèrent à la division sexuelle du travail (DST) traditionnelle. Il questionne les ressources dont elles disposent pour gérer leur quotidien entre contraintes familiales et obligations professionnelles dans le but de discuter les reconfigurations dans les rôles genrés.Méthodologie : Pour ce faire, la réflexion s’appuie sur des terrains ethnographiques réalisés à Lomé au cours des cinq dernières années. Une micro-analyse des rapports de genre est privilégiée dans le souci d’appréhender les itinéraires de réussite des entrepreneures dans une approche relationnelle. Le matériel empirique se compose d’entretiens, d’observations en entreprises et en dehors de celles-ci, de discussions informelles et d’un questionnaire sur la répartition des dépenses et des tâches au quotidien.Résultats : Les résultats indiquent que la conciliation travail professionnel-travail domestique est considérée comme un devoir de femme mariée. La principale ressource dont disposent ces femmes pour s’organiser est le transfert des charges domestiques sur d’autres femmes autant au domicile que dans l’entreprise. Conclusions : L’adhésion à la DST est déterminée par la place occupée par le mariage dans la réussite et par des enjeux de reconnaissance sociale associés au rôle reproducteur des femmes. Les cheffes d’entreprise de Lomé ne pourraient pas être les superwomen qu’elles essayent d’être sans le recours à d’autres femmes. Contribution : L’accès des femmes à des postes à fortes responsabilités ne modifie pas complètement les rôles de genre si l’on se penche spécifiquement sur la division sexuelle du travail. La reconfiguration des rapports de genre est partiellement dépendante de l’empowerment économique des femmes. Toutefois, la négociation sociale du statut de cheffe d’entreprise se fait dans la transgression des normes de genre mais surtout dans la perpétuation d’un ordre inégalitaire de genre qui accompagne paradoxalement les changements. Cet article nous invite à reconsidérer l’empowerment comme un processus socio-politique à la fois individuel et collectif., Research Framework : Togo is a country with a strong trade tradition and a high female labor participation rate. Women are encouraged to become entrepreneurs and they are free to make use of their revenue. At the same time, they bear a heavier burden than men in terms of work/life balance since they are responsible for virtually all domestic work. While most women are confined to informal sectors of activity, some businesswomen in Lomé have managed to be active in emerging areas of the formal economy. This investigation is about the women who seem to be an archetype for women emancipating themselves through work. These are the women who studied at universities and belong to associations that promote female entrepreneurship and empowerment. Objectives : The article explores the way these women fit within the gendered division of labor. It investigates the tools women use to manage everyday lives filled with familial constraints and professional obligations.Methodology : This study is based on ethnographic fieldwork conducted in Lomé over five years. A micro-analysis of gender relations was applied to reveal the trajectories of success in these female entrepreneurs by taking a relational approach. The empirical material was gathered using interviews and observations in and outside of businesses, as well as informal discussions and through the use of a questionnaire about expenses and tasks.Results : The results show that the work/family balance is seen as the duty of married women. The most common solution to this problem is transferring the care work to other women at home and at their places of work.Conclusions : The study highlights that women adhere to the gendered division of labor because of social standards regarding marriage and due to issues of social recognition associated with the female reproductive role. The businesswomen of Lomé may be regarded as “superwomen” however, to reach this brass ring, they must shift some of their burden onto other women.Contribution : The fact that women have access to high responsibility jobs hasn’t completely changed traditional gendered roles. The reconfiguration of gender relations depends on the economic empowerment of women. However, the social negotiation of a company manager’s status is made by transgressing gender norms but also by perpetuating the inequality of order. This article invites us to see empowerment as a sociopolitical process which is both individual and collective.