Coustillas, J., Cachot, J., Le Pichon, Céline, Budzinski, H., Lambert, Patrick, Bunel, Marie, Daverat, C., Roqueplo, Charles, Clerandeau, C., Baudrimont, M., Gonzalez, P., Larrieu, S., Trancart, Thomas, Zahm, Amandine, Chèvre, Patrick, DUHAMEL, Sophie, Le Barh, Romaric, Gazeau-Nadin, Christine, Dublon, J., Delorme, N., Pichon, A., Rochard, Eric, Ecosystèmes estuariens et poissons migrateurs amphihalins (UR EPBX), Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA), Environnements et Paléoenvironnements OCéaniques (EPOC), Observatoire aquitain des sciences de l'univers (OASU), Université Sciences et Technologies - Bordeaux 1-Institut national des sciences de l'Univers (INSU - CNRS)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Université Sciences et Technologies - Bordeaux 1-Institut national des sciences de l'Univers (INSU - CNRS)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-École pratique des hautes études (EPHE), Université Paris sciences et lettres (PSL)-Université Paris sciences et lettres (PSL)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Hydrosystèmes et Bioprocédés (UR HBAN), Cellule de Suivi du Littoral Normand (CSLN), Collectivités territoriales (appel d'offres national ou régional), irstea, and GIP Seine aval
Ce travail vise à comparer de quelles manières les trois espèces de poissons migrateurs thalassotoques (i.e. qui se reproduisent en mer et vont grandir dans les bassins versants) fréquentant la façade Atlantique : le mulet porc, l'anguille européenne et le flet, colonisent les estuaires de la Seine et de la Gironde et effectue leur croissance. L'hypothèse principale était que leur comportement pouvait être influencé par le niveau de contamination et de pressions anthropiques des estuaires. La démarche retenue pour aborder ces différentes échelles de manière comparative (entre les espèces et entre deux sites situées de manière similaire en Seine et en Gironde) a consisté à examiner : i) la phase de colonisation initiale à un stade très jeune par une approche expérimentale en mésocosme ; ii) la phase de croissance par un suivi en télémétrie acoustique en période estivale ; ii) l'ensemble du cycle vital par une analyse rétrospective à l'aide de la microchimie des otolithes des différents compartiments halins utilisés. Les trois niveaux d'analyse effectués avec des méthodes différentes permettent de dégager des patrons spécifiques (colonisation initiale, phase de croissance, cycle de vie) mais les différences entre les sites ne sont vraiment claires qu'à l'échelle très globale de l'utilisation des différents compartiments. Contrairement à notre hypothèse de départ les jeunes migrateurs thalassotoques parviennent à adopter un comportement spécifique en phase avec un rythme de type circadotidal ou nycthéméral y compris dans une ambiance de type Seine (très chargée en contaminants). Leur comportement est d'ailleurs peu différent dans les ambiances Seine ou Gironde. Il est donc tout à fait possible qu'ils ne soient pas extrêmement perturbés par les contaminants issus des sédiments que ce soit en Seine ou en Gironde. On notera toutefois que les civelles ont construit moins de terriers dans le sédiment de l'ambiance Seine que dans celui de l'ambiance Gironde, on peut imaginer que la plus forte contamination du sédiment de Seine les en dissuade. La fonctionnalité de corridor écologique ne semble donc pas empêchée par la contamination des sédiments. Durant leur phase de croissance en zone tidale d'eau douce les espèces étudiées utilisent des habitats différents selon des patrons temporels spécifiques (par exemple les mulets porcs utilisent les zones intertidales et les bras morts lors des flots de jours ; durant le jour les anguilles demeurent à l'abri dans des enrochements grossiers tandis que durant la nuit elles se déplacent dans des zones profondes à la recherche de leurs proies). Les résultats obtenus sur la Seine sont cohérent avec ceux obtenus sur la Gironde, ainsi dans les deux cas les flets recherchent de zones fraiches (ombre en Gironde, embouchures d'affluents plus frais en Seine), les anguilles présentent une activité principalement nocturne. La réaction des espèces au stress du marquage est très différente selon les espèces. Les mulets quittent très vite le secteur tandis que les anguilles et les flets sont au contraire extrêmement immobiles en "attendant" que leur condition s'améliore. Un épisode hypoxique observé en fin d'été sur la Seine a coïncidé avec un immobilisme des anguilles laissant penser que leur réaction à un stress environnemental pourrait se traduire par le même type de comportement que leur réaction au marquage. Les mulets de la Seine semblent moins inféodés à l'estuaire saumâtre que les mulets de la Gironde, ceci pourrait s'expliquer par la plus grande dimension de l'estuaire de la Gironde. Les anguilles de la Seine et de la Gironde présentent une grande variabilité d'histoires de vie mais on ne peut pas dégager de différences d'utilisation notables des habitats entre la Seine et la Gironde. Chez les flets la contribution des mères ayant utilisé l’eau douce est relativement plus importante en Seine qu'en Gironde. On en déduit une utilisation plus importante des habitats d’eau douce par les flets de Seine en comparaison avec les flets de la Gironde. Il en ressort globalement que les habitats dulcaquicoles de la Seine (trés diversifiés : bathymétrie, substrat, ripisylve…) sont proportionnellement plus utilisés par les espèces thalassotoques que ceux de Gironde. Cela peut s'expliquer par une moindre attractivité (ou une moindre capacité d'accueil) de l'estuaire saumatre de la Seine ou au contraire par une plus grande attractivité (ou une plus grande capacité d'accueil) de l'estuaire dulcaquicole de la Seine. Les comportements mis en évidence sur ces secteurs pourraient servir de référence pour des opérations de restauration.