Le XXe siècle occidental est marqué par un recul de la religiosité, alors que le rationalisme hérité des Lumières, le positivisme et la justice sont des valeurs qui régissent et normalisent l’espace social. Pourtant, le sacrifice (dont l’étymologie sacrum facere signifie « faire un acte sacré »), même s’il est rendu inadmissible en raison de la violence gratuite qu’il suppose, continue de fasciner, et ce, malgré que les divinités n’aient plus de valeur de régulation sociale. Antonin Artaud, Laure (Colette Peignot), Michel Leiris et Unica Zürn ont une pratique d’écriture qui emprunte à l’imaginaire sacrificiel, peuplé de figures mythiques, en plus d’aspirer à l’efficacité de la performance rituelle. Ainsi, le sacrifice rituel offre un répertoire de figures et de motifs mythiques, d’une part, et propose des formes agissantes qui influencent les créateurs, d’autre part. Le champ de la poïétique invite à interroger les oeuvres littéraires en regard de leur processus créateur. Les oeuvres à l’étude se prêtent tout particulièrement à une étude poïétique en raison de leur nature processuelle, parfois inachevées, et de la présence de commentaires autoréflexifs sur la création. Si on considère que tout texte contient le récit de sa propre création, il est possible de penser les oeuvres littéraires comme des traces d’un processus créateur qui, lorsque lié au sacrifice rituel, cherche à défricher un espace sacré en même temps qu’il enclenche un processus éthopoïétique de dé-subjectivation. Sacrifice rituel et création sont deux moyens de « passer à l’acte » (l’acte d’écriture, l’acte de la mise à mort), permettant aux écrivaines et aux écrivains de soumettre leur existence à une forme signifiante. La poïétique, interrogée à l’aune du sacrifice rituel, permet de penser les continuités, les transvasements et les ruptures entre existence et écriture., Western 20th century is characterized by a decline of religiosity, while modern societies are governed and normalized by rationalism, positivism and justice as guiding values. Sacrifice, of which latin etymology sacrum facere means “to do a sacred act”, implies a ritual act of violence. Even if sacrifice had become inacceptable because of the free violence on which it’s based on, and even if gods have lost their power of social regulation, sacrifice continues to fascinate. The writings of Antonin Artaud, Laure (Colette Peignot), Michel Leiris and Unica Zürn are inspired by sacrificial rituals : writers borrow mythological figures linked to sacrificial scenes and they are motivated by the efficiency of ritual performances. Ritual sacrifice offers multiple mythological figures and patterns, and proposes effective forms that impact writing. The field of “poïétique” investigates the creative path preceding published writings. The works studied in this thesis are particularly suited for a “poïetique” reading because of their processual character – some of them are considered unfinished – and because of the presence of self-reflective comments about the creative process. Considering that all texts contain the story of its own creation, it is possible to think of the works as tracks of the writing in process. When creation has to do with ritual sacrifice, it leads to the opening of sacred spaces and activates a process of de-subjectification. Ritual sacrifice and creation are two ways of taking action that allow writers to give their existence a meaningful shape. Thinking about the sacrifice through the field of “poïétique” is a way to reflect upon the continuum, the transfer or the disruption between existence and writing.