Black is, black ain’t : la reception des classiques et le neant chez Ralph Ellison, Derek Walcott et Wole Soyinka L’association de l’Europe avec la lumiere et de l’Afrique avec l’obscurite est tellement ancree dans la pensee occidentale qu’elle a acquis une forme de perennite ontologique. Des lors que l’on evoque des personnes d’origine africaine, le fait d’imposer ce type d’images sur la description de corps leur donne une forme d’existence. L’une des facons dont les auteurs postcoloniaux se sont confrontes a la modernite occidentale est de faire retour vers certains aspects de l’Antiquite classique, parfois presents, bien que refoules, qui perturbent la dichotomie rassurante entre lumiere et obscurite, bien et mal, blanc et noir. Fonde sur une analyse philosophique en profondeur de l’ontologie heidegerrienne de Levinas, cet article examine la facon dont Ralph Ellison, Wole Soyinka et Derek Walcott se penchent sur les points sensibles de la tradition classique occidentale pour en extraire du sens. Ce sont, respectivement, les enfers virgiliens sombres, mais creatifs, le chaos generateur de Dionysos, l’Ogun de Soyinka, et le desordre constructif des ruines antiques, qui sont comme la mer. Ceci n’implique pas que chaque auteur soit noir, du point de vue de son identite sociale, mais plutot que « l’obscurite de la lumiere » constitue une reponse phenomenologique au chaos et a l’ordre, a la nation et a la signification artistique.