Opioid analgesic prescriptions have increased significantly over the past decade in most industrialized countries. This inflation has logically been accompanied by an increase in complications related to the iatrogenicity of these drugs, primarily problems of dependence, use disorders, unintentional intoxication and, in some cases, death. Today, France appears to have been spared from what is now called the ‘opioid crisis’, due to its strict regulations on the prescription and dispensing of these drugs, which are mostly classified as narcotics. However, the latest report (2019): ‘Use and Abuse of Opioid Analgesics’ from the National Agency for the Safety of Medicines and Health Products: ’Morphine sulfate is the most consumed strong opioid analgesic supplied by high street pharmacies, and has the highest rate of notifications, in particular concerning the product Skénan® which represents 81% of notifications.’ These alerts particularly targeted two patient populations, to which the first two parts of this research work will be focused.The first part of this work focused on evaluating the use of morphine sulfate outside the scope of the Marketing Authorization in the context of opioid use disorders as an alternative to conventional treatments (buprenorphine or methadone), or as a replacement for heroin. The prevalence of this alternative use remained unknown, as did the sociodemographic and health characteristics of these patients and the complications to which this use could expose them. The assessment of these risks is of particular importance, as the sustained-release galenic form of Skénan® has been described by previous studies as frequently altered to be injected intravenously, increasing the risks of overdoses and infectious as well as thrombotic complications. The use of pharmacoepidemiological approaches based on exhaustive French health insurance reimbursement databases has shown that regular use of morphine, as a substitution therapy, concerned only a minority of patients (1.0%) out of all those affected by opioid use disorders. However, these users would be at 3.8- and 2.0-times greater risk of overdose within one year after starting morphine than controls who started buprenorphine or methadone, respectively. The risks of death, misuse, and bacterial infections were also increased, while their overall social and health status appeared more vulnerable, with increased comorbidities compared to controls.The second part of this manuscript was focused on patients suffering from chronic pain, receiving regular and persistent oral morphine sulfate prescriptions in this context. Pharmacovigilance data indicate that a number of them have developed opioid use disorders secondary to morphine sulfate iatrogenicity, which may be accompanied by unintentional intoxication. In the absence of French data concerning the prevalence of overdoses and morphine use disorders in chronic pain patients with and without opioid dependence, we conducted a pharmacoepidemiological study comparing the results with those of non-pain dependent controls. In the absence of French data concerning the prevalence of overdoses and morphine use disorders in chronic pain patients with and without opioid dependence, we conducted a pharmacoepidemiological study comparing the results with those of non-pain dependent controls. In France, in 2015, 16,665 chronic pain patients benefiting from regular morphine sulfate dispensing were identified, of whom 905, i.e. 5.4%, presented an opioid use disorder comorbid to their pain. Among the latter, the prevalence of overdose hospitalizations was 6.0-times higher than that of pain non-dependent patients and twice that of pain dependent controls. The social and health characteristics of these pain-dependent patients were at the interface between those of the painful non-dependent, less vulnerable, and the painless non-dependent, more deprived. (...), La prescription d’antalgiques opioïdes a fortement augmenté ces dix dernières années dans la plupart des pays industrialisés. Cette inflation s’est logiquement accompagnée d’un accroissement des complications iatrogènes de ces molécules, aux premiers rangs desquels les problématiques de dépendance, de trouble de l’usage, d’intoxications involontaires et parfois de décès. La France paraît, à l’heure actuelle, globalement préservée de ce qui est désormais qualifié de « crise des opioïdes », grâce à sa réglementation stricte sur la prescription et la délivrance de ces molécules, dont la plupart sont classées comme stupéfiants. Toutefois, le dernier rapport (2019) « État des lieux de la consommation des antalgiques opioïdes et leurs usages problématiques » de l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé, pointe l’existence de signaux d’alerte sur un opioïde spécifique : « le sulfate de morphine est l’antalgique opioïde fort le plus consommé en ville et ayant le taux de notifications le plus important ; en particulier la spécialité Skénan® qui représente 81 % des notifications ». Ces alertes ciblaient particulièrement deux populations de patients, auxquels les deux premières parties de ce travail de recherche vont se consacrer.La première partie de ce travail s’est attachée à évaluer l’usage de sulfate de morphine hors Autorisation de Mise sur le Marché dans un contexte de trouble de l’usage d’opioïdes comme médicament de substitution alternatif aux traitements conventionnels (buprénorphine ou méthadone), ou en remplacement de l’héroïne. La prévalence de cet usage alternatif restait méconnue, tout comme les caractéristiques sociodémographiques et sanitaires de ces patients et les complications auxquels cet usage pouvait les exposer. L’évaluation de ces risques revêt une importance particulière, la galénique à libération prolongée du Skénan® étant décrite par les études antérieures comme fréquemment altérée pour être injectée par voie intraveineuse, majorant les risques de surdose et de complications infectieuses, mais aussi thrombotiques. L’utilisation d’approches pharmacoépidémiologiques sur bases de données exhaustives de remboursements de l’Assurance Maladie a permis de montrer que l’usage régulier de morphine, à la manière d’un médicament de substitution, ne concernait qu’une minorité de patients (1,0 %), rapporté à l’ensemble de ceux concernés par un trouble de l’usage d’opioïde. Toutefois, ces usagers encourraient un risque de surdose dans l’année suivant l’instauration de la morphine 3,8 et 2 fois supérieur aux témoins qui débutaient, respectivement, de la buprénorphine ou de la méthadone. Les risques de décès, de mésusage, et d’infections bactériennes étaient aussi augmentés, tandis que leur situation sociale et sanitaire générale paraissait plus précaire, avec des comorbidités accrues par rapport aux témoins. La deuxième partie de ce manuscrit s’est consacrée aux patients souffrant de douleurs chroniques, recevant des prescriptions régulières et persistantes de sulfate de morphine oral dans ce contexte. Les données de pharmacovigilance indiquent qu’un certain nombre d’entre eux ont développé un trouble de l’usage d’opioïdes secondaire iatrogène au sulfate de morphine, pouvant s’accompagner d’intoxications involontaires. En l’absence de données françaises concernant la prévalence des surdoses et troubles de l’usage de morphine chez les patients douloureux chroniques avec et sans dépendance aux opioïdes, nous avons conduit une étude pharmacoépidémiologique dont nous avons comparé les résultats avec ceux de témoins dépendants non-douloureux. En France, en 2015, 16 665 patients douloureux chroniques bénéficiant de délivrances régulières de sulfate de morphine ont été identifiés, parmi lesquels 905, soit 5,4 %, présentaient un trouble de l’usage d’opioïdes comorbide à leurs douleurs. (...)