Poplars bred for the future by INRA include two North American species : eastern and black cottonwood and the European black poplar. The breeding strategy, now under discussion, needs to be based on the biological and genetic properties of the species. The present study aims to estimate the genetic parameters in the eastern cottonwood (Populus deltoïdes Bartr.). A factorial crossing design involving 6 females and 6 males was carried out between 1971 and 1980. Observations on copies of the parents and of their offsprings were made in 1985 and 1986 in a design laid out in the INRA, experimental nursery near Orléans, France. Observations concerned phenology, growth and wood quality. Firstly, the results showed a significant variability of most traits, whether among parents, among families or among cloned full-sibs; but this variability was greater among parents than among families which can be explained by the assumption that allelic fixation occurred in the natural stands the parents originated from. This allelic fixation was high for phenologic traits, moderate for growth traits and absent for wood quality traits. Secondly,heritabilities were estimated. Broad sense heritabilities were generally high and significant for all types of traits. Narrow sense heritabilities estimated from parent-offspring regression are extremely low for wood quality traits. Thirdly, additive genetic correlations between traits were estimated. Significant values were found between phenology and growth traits and between growth termination and wood basic density, which means that fast growing genotypes should be looked for among early starters rather than among late growers. The latter will tend to produce wood with a low basic density which is not suitable for poplar., Le programme d’amélioration des peupliers, en France, est basé sur 3 espèces principales. Deux sont nord-américaines, un peuplier noir, Populus deltoïdes Bartr. et un peuplier baumier, Populus trichocarpa Torr. et Gray. La troisième est européenne, Populus nigra L. Le choix de la stratégie d’amélioration est basé sur une connaissance biologique et génétique des espèces. Une publication récente des mêmes auteurs (Pichot & Teissier du Cros, 1988) a apporté une information génétique sur P. Nigra obtenue grâce à l’analyse de descendances issues d’un plan de croisement factoriel 4 x 6. La présente étude se propose d’apporter une information analogue sur P. deltoïdes. Jusqu’à maintenant, chez les peupliers, l’information génétique sur les espèces a été obtenue dans des plantations comparatives de clones, ou mieux, grâce à des comparaisons de descendances maternelles issues de pollinisation libre. Les paramètres génétiques sont estimés ici au moyen d’un plan de croisement factoriel à partir de 6 mères et de 6 pères d’origine américaine et ayant fait partie de la collection de Vineuil, près de Blois, France (Tableau II). Le dispositif expérimental installé dans la pépinière du centre INRA d’Orléans, France, comprenait, dans chacune de ses 3 répétitions, 3 copies végétatives de 10 des 12 parents et 1 copie d’en général 30 descendants pour chacune des 33 familles qui ont été obtenues après 10 années de croisements (Tableau I). Dans ce dispositif cohabitaient les parents et leurs descendants dans des conditions physiologiques et environnementales en tous points comparables. Les observations ont porté sur des caractères phénologiques - débourrement végétatif, arrêt de croissance, défeuillaison, - sur des caractères de croissance - hauteur en première et deuxième année, diamètre - et sur des caractères liés à la qualité du bois - angle des branches et densité du bois. Pour éviter une méthode destructive, la densité du bois a été mesurée sur les branches apparues en deuxième année, elle présente une corrélation de 0,55 avec la densité du bois des tiges. Les analyses ont porté sur les clones parentaux, sur les descendances (demi-frères et pleins frères) et sur les pleins frères clonés. Elles ont d’abord permis de connaïtre la variabilité des caractères et le niveau de signification de cette variabilité (Tableaux II et VI). Mais une observation détaillée des résultats, confirmée par la valeur, de rapports de coefficients de variation et de variances additives entre familles de demi-frères et descendants clonés (Tableaux VII et VIII), a montré que les parents du plan de croisement avaient une variabilité plus élevée que la moyenne de leurs descendances. Ce fait peut être attribué à un taux de fixation allélique, relativement élevé pour les caractères phénologiques, moyen pour les caractères de croissance et faible pour les caractères liés à la qualité du bois (Tableau IX). La deuxième phase de l’analyse a porté sur l’estimation des héritabilités au sens large sur les parents et les copies des descendants et sur les héritabilités au sens strict, tenant compte ou non des coefficients de fixation allélique, estimées à partir des familles et au moyen des régressions parents-descendants (Tableau X). Comme on peut s'y attendre, compte tenu des résultats obtenus jusqu’alors, des valeurs en général élevées sont trouvées pour les critères phénologiques, des valeurs moyennes pour les caractères de croissance et de qualité du bois. Une particularité importante apparaît, c’est la distorsion entre les valeurs d’héritabilité de la densité du bois suivant le mode d’estimation. La troisième phase de l’analyse porte sur les corrélations génétiques entre caractères (Tableau XI). Les corrélations sont significatives entre caractères de croissance. De même, des corrélations élevées sont rencontrées entre caractères phénologiques et croissance, un débourrement précoce et un arrêt de croissance tardif sont en corrélation positive avec la croissance en hauteur. Mais plus difficile à prendre en compte est la corrélation entre l’arrêt de croissance et la densité du bois qui conduirait à diminuer la densité de génotypes à arrêt de croissance tardif, ce qui n’est pas concevable chez les peupliers. L’effet de cette dernière corrélation est, bien entendu, à nuancer compte tenu du fait qu’elle a été obtenue à partir d’une densité du bois de branche. Prises dans leur ensemble, ces corrélations conduiraient à choisir des génotypes à débourrement précoce (si cela n’induit pas une sensibilité aux gelées tardives), plutôt qu’à arrêt de croissance tardif. La quatrième phase de l’analyse est la simulation de l’évolution des paramètres et de leur niveau de signification lorsqu’on réduit le plan de croisement pour tenter d’optimiser le coût d’une telle opération. Cette simulation montre que l’on peut réduire à 10 ou 15, au lieu de 30, le nombre de descendants par famille, mais que, au contraire, le nombre de 6 parents par sexe semble une limite inférieure (Tableaux XII et XIII). Les conséquences de ces résultats sur la stratégie d’amélioration sont nombreuses. Dans un schéma d’amélioration faisant intervenir plusieurs espèces, une phase intraspécifique est indispensable. Elle débute par le rassemblement d’un matériel de base représentatif de l’aire de l’espèce. Elle se poursuit par une sélection clonale pour laquelle la connaissance génétique des espèces est indispensable. Cette étude montre que les héritabilités au sens large sont élevées pour tous les caractères étudiés, et que les corrélations génétiques entre caractères sont significatives, notamment pour ce qui concerne la liaison entre les critères phénologiques et la croissance, d’une part, et l’arrêt de croissance et la densité du bois, d’autre part. La sélection clonale devient ensuite sélection parentale pour laquelle la connaissance des héritabilités permettra de déterminer le gain que l’on pourra obtenir d’une génération à l’autre. D’une manière générale, dans notre échantillon, l'additivité est plus élevée que la dominance. La sélection parentale conduit à un gain génétique chez les descendants. Ce gain est marqué pour les critères phénologiques, notamment le débourrement; il est moyen pour les critères de croissance, mais celle-ci, rappelons-le, faible pour les critères de qualité du bois. Les résultats étant basés sur des observations de deux années de pépinière, nécessiteront confirmation, grâce au transfert en peupleraie des parents et descendants de ce plan de croisement. Ce transfert a eu lieu au printemps 1988. Un certain nombre d’années sera donc nécessaire avant d’entreprendre une nouvelle analyse de ce plan de croisement.