Résumé Les racines philosophiques, sociologiques et psychiques du fanatisme sont indissociables de ses mécanismes psychopathologiques collectifs et individuels. L’existence d’une « idée fixe » caractérise la personnalité fanatique et la personnalité paranoïaque, mais les fanatiques ne se mettent pas en avant comme les paranoïaques ; ils subordonnent de façon désintéressée toutes leurs activités à des idées d’ordre général. Les paranoïaques sont au sommet dans les organisations de type sectaire. Mégalomaniaques, intransigeants, rigides et rancuniers, ils luttent au nom du bien contre l’ennemi extérieur. La sémiologie fanatique coïncide, sur plus d’un point, avec celle de la passion amoureuse exclusive et idolâtrée. L’intensité de l’investissement affectif du sentiment amoureux avec son caractère exclusif évoque l’idée fixe, inaccessible à la moindre critique et à toute remise en cause. L’idée délirante naît à l’intérieur de la sphère psychique du sujet ; elle est le fruit d’une interprétation qui en est le mécanisme le plus fréquent. L’idée qui guide un fanatique vient de l’extérieur ; il n’y pas d’interprétation ; l’idée a été élaborée par le leader et elle est adoptée à l’emporte-pièce par les fanatiques. Les idées délirantes sont individuelles contrairement aux idées fanatiques qui sont partagées entre plusieurs membres du même groupe. L’étude de cas de A.-B. Breivic, auteur de l’attentat du 22 juillet 2011 et de la tuerie qui a fait 74 victimes, montre la difficulté de séparer terrorisme et folie, fanatisme et paranoïa. Le fanatisme oblige les psychiatres experts à évaluer un individu, sans assimiler celui-ci à son acte, aussi « fou » que celui-ci puisse paraître, acte parfois commis en l’absence d’éléments objectivables d’une « folie » suspectée. Mais l’association d’un trouble de la personnalité complexe, comprenant des éléments fanatiques et paranoïaques avec des manifestations psychotiques, est susceptible de majorer considérablement le risque de passage à l’acte dangereux. The philosophical, sociological, and psychic roots of fanaticism cannot be separated from its individual and collective psychopathological mechanisms. The fanatical personality and the paranoid personality are both characterized by an “idée fixe”. However, fanatics are more discreet than paranoid subjects; and all their activities are subordinated to ideas of general order. One finds paranoid personalities in authority positions in cult-like organizations. Megalomaniacal, intransigent, rigid, and resentful, they fight against an outside enemy in the name of Good. The fanatical semiology coincides, in more ways than one, with that of an exclusive and idolizing romantic passion. The intensity of the affective investment of the romantic feeling with its exclusive character recalls an “idée fixe”, impervious to any criticism or questioning. Delusions are born within the subject's psyche; it is most often the result of an interpretative mechanism. Whereas for the fanatic, the idea comes from the outside: There is no interpretation, and the idea, elaborated by a leader, has simply been taken up by his fanatical followers. Delusions are individual, contrary to fanatical ideas that are shared by several members of the same group. The case of Anders Behring Breivik, whose murderous attack on July 22nd, 2011 left 74 people dead, provides an example of the difficulty in separating terrorism from madness, fanaticism from paranoia. Fanaticism requires forensic psychiatrists to evaluate an individual, without assimilating him to his act, no matter how “mad” the act may appear, and despite the fact that the act may have been committed in the absence of objectifiable elements of a suspected “madness”. But the combination of a complex personality disorder (comprising fanatical and paranoid elements) with psychotic manifestations is likely to significantly increase the risk of a dangerous act. [ABSTRACT FROM AUTHOR]