1. Quand la passion s’emmêle. De l’investissement de soi à la souffrance dans une MJC, scène de musiques actuelles
- Author
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Loriol, Marc, Line, Spielmann, Institutions et Dynamiques Historiques de l'Economie (IDHE), École normale supérieure - Cachan (ENS Cachan)-Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (UP1)-Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis (UP8)-Université Paris Nanterre (UPN)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Institutions et Dynamiques Historiques de l'Économie et de la Société (IDHES), Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (UP1)-Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis (UP8)-Université Paris Nanterre (UPN)-Université d'Évry-Val-d'Essonne (UEVE)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Ecole Normale Supérieure Paris-Saclay (ENS Paris Saclay), Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (UP1), and Marc Loriol et Nathalie Leroux
- Subjects
[SHS.SOCIO]Humanities and Social Sciences/Sociology ,burnout ,régulation ,idéal ,collectif de travail ,engagement - Abstract
National audience; Par l’intermédiaire d’un collègue, bénévole dans cette structure, le conseil d’administration d’une MJC ayant le label « scène de musiques actuelles (SMAC) » sollicite une intervention sociologique pour aider l’équipe dans sa réflexion concernant un problème apparemment paradoxal : celui de l’engagement passionné de ses salariés. A priori, quoi de plus favorable pour le bien-être que de travailler dans un domaine qui vous passionne, de s’investir dans son travail sans sentiment de contrainte et dans le plaisir de faire ce qui plaît ? Pourtant, cette passion est également perçue comme dangereuse, source de difficultés, voire dans certains cas de souffrances et de problèmes de santé. Des plaintes exprimées par les salariés sur le manque de reconnaissance et la définition insuffisamment précise du contour des tâches de chacun, des conflits interpersonnels, le turn-over dans certains postes, des problèmes de santé (burn out, surmenage, accidents cardiaques, troubles dermatologiques, etc.) attribués au travail par les intéressés ou leurs collègues, témoignent de ces difficultés. Dès lors, en interne, la passion est diagnostiquée comme un problème. La passion, qui domine le libre arbitre et pousse aux excès productifs, deviendrait un risque et les salariés et la direction se demandent comment la contrôler, la réduire, sans pour autant la détruire et tomber dans un travail sans plaisir ni engagement. Mais la passion ne doit pas être pensée comme une force mystérieuse qui aliène l’individu et le place dans une « servitude volontaire », mais comme une construction collective fragile. Une des raisons de cet engagement apparemment sans limites est alors à chercher dans les formes de régulations collectives de l’idéal au travail, dans la constitution d’un intérêt du travail complexe et traversé par des incertitudes et des contradictions. Le mythe de la passion au travail, de la totale complémentarité entre l’épanouissement et la réalisation de soi dans le travail avec les contraintes organisationnelles ou extérieures, perdure à la seule condition que le collectif de travail puisse entretenir la valorisation des tâches réalisées et protéger l’idéal professionnel des remises en cause par l’environnement. L'engagement et la passion ne sont pas inépuisables et peuvent d'autant plus vite se tarir que la satisfaction de faire un travail de grande qualité, source de renouvellement de cette passion, ne repose pas seulement sur les compétences des équipes, mais aussi sur le contexte et les collectifs de travail qui définissent les critères, objectifs ou subjectifs, d'évaluation du travail.
- Published
- 2015