L’écocritique matérialiste s’intéresse au rapport entre matière et représentation. À cet égard, la biosémiotique et l’écosémiotique fournissent un cadre théorique apte à fonder une compréhension processuelle des relations signifiantes unissant les organismes et leur environnement. La théorie de l’Umwelt de Jakob von Uexküll et celle des affordances de James J. Gibson, mais également la typologie des signes de Charles S. Peirce et la sémiotique culturelle de Iouri Lotman constituent un ensemble théorique cohérent sur lequel l’écocritique matérialiste pourrait s’appuyer pour fonder un modèle conceptuel adéquat à son projet d’interprétation des textes et des pratiques culturelles liées à la nature. Afin d’instaurer un dialogue entre la biosémiotique et l’écocritique matérialiste, un modèle conceptuel décrivant le processus par lequel la matière devient sémiotisée est proposé dans cet article. En tenant compte, d’une part, de la capacité de la matière à produire des significations, mais également, d’autre part, de la façon dont les actions humaines modifient les propriétés sémiotiques de la matière, une zone hybride entre l’agentivité de la matière et la modélisation humaine devrait être considérée dans une perspective écocritique.